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MOZART, La clemenza di Tito – Hambourg

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Spectacle
24 octobre 2024
Les coulisses du pouvoir

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Opera seria en deux actes
Musique de Wolfgang Amadeus Mozart sur un livret de Caterino Mazzolà d’après Metastase et la Vie des douze Césars de Suétone
Création le 6 septembre 1791  au Théâtre Stavovské divadlo à Prague

Détails

Mise en scène
Jetske Mijnssen
Décors et costumes
Ben Baur
Lumières
Bernd Purkrabek

Tito
Oleksiy Palchykov
Sesto
Angela Brower
Annio
Kady Evanyshyn
Servilia
Olivia Boen
Vitellia
Tarra Erraught
Publio
William Guanbo Su

Chœur du Hamburgische Staatsoper
Chef des chœurs
Eberhard Friedrich
Philharmonisches Staatsorchester Hamburg
Direction musicale
Ben Glassberg

Hambourg, Staatsoper
Mardi 22 octobre 2024, 19h

 

Beaucoup de belles choses dans cette nouvelle production de La clémence de Titus présente à Hambourg depuis avril dernier. Beaucoup de partis pris aussi dans la vision de la metteuse en scène néerlandaise Jetske Mijnssen, pour un résultat qui pourrait bien ne pas contenter les puristes, mais qui offre une relecture dynamisante de l’ultime chef-d’œuvre mozartien.
Mijnssen prend un évident plaisir à montrer et démonter les rouages, les arcanes, les coulisses du pouvoir. Titus ici, costume trois pièces-cravate, est l’évident avatar de l’homme de pouvoir et au pouvoir. Empereur, roi, président, ministre, dirigeant ? Qu’importe, c’est la situation et l’exercice du pouvoir qui sont scrutés ici, sous beaucoup, si ce n’est sous toutes ses formes. « Toute ressemblance avec un personnage existant ou ayant existé… », cela est laissé à l’appréciation du spectateur qui pourrait bien avoir sa petite idée.
Le mécanisme de l’exercice du pouvoir est décortiqué selon quatre paradigmes affichés comme au fronton des lieux où tout se décide.


© Hans Jörg Michel

« Delizia » tout d’abord, la joie, la fête, les relations qui se nouent dans l’urgence, dans la danse, l’alcool et ses excès. C’est ce que montre la scène initiale qui se joue pendant l’ouverture. Titus et Bénénice forment un couple heureux, mais l’annonce par Publius (qui n’est autre ici que le garde du corps) que Titus devient empereur change tout. Titus renonce alors à Bérénice, la renvoie sans autre forme de procès et paie ainsi un premier prix fort à son accession au pouvoir.
« Potenza » ensuite, le pouvoir lui-même, les ors du palais, l’exercice au quotidien. Les conseillers qui s’agglutinent autour de Titus, le pressent de signer, de décider, de trancher, ce cabinet qui le rend fou, qui devient son cauchemar, qui l’isole entièrement. L’image d’un Titus désespéré, assis seul sur une chaise en position fœtale, est une belle allégorie de la déflagration que représentent les responsabilités insurmontables qui s’abattent sur lui. Mais la « potenza » ce sont aussi les relations hommes-femmes et les dérives qui se jouent à l’intérieur même des lieux de pouvoir, les entreprises de séduction, les trahisons. « Tradimento » justement : au second acte, la trahison est mise en scène, et comment ! Le Capitole qui brûle (vraiment), les petitesses et les petits arrangements, les ordres et les contre-ordres, tout cela ressemble à une – plutôt bonne – série Netflix et ses multiples rebondissements. Et puis enfin la « clemenza », cette improbable indulgence de l’homme de pouvoir trahi mais qui passe l’éponge. Ou plutôt qui renonce à l’obstacle, qui renonce à comprendre les rouages du mécanisme qui a conduit à ce que l’un de ses plus proches le trahisse. En effet, non seulement Titus renonce à exécuter Sextus, qu’il menace jusqu’au dernier moment d’un pistolet, mais, dans une ultime hallucination, retourne l’arme contre lui quand retentit le dernier accord ; Titus a démontré qu’il n’était pas l’homme de la situation de pouvoir, que la barre était en quelque sorte trop haute et que l’ambition du pouvoir ne crée pas forcément les capacités à l’exercer.
On pourra reprocher à cette proposition décidément captivante d’avoir voulu être parfois trop démonstrative. Faire creuser à Sextus sa propre tombe dans le Capitole en ruine fait sourire plus qu’autre chose, et voir Titus planter l’arbre de la réconciliation avant de se tirer une balle dans la tête fait de lui un personnage falot, plus que naïf, qui dessert plutôt la démonstration.


© Hans Jörg Michel

En revanche, le parti pris de supprimer les trois quarts des récitatifs secs, s’il peut fortement irriter sur le papier, se révèle au final convaincant. Ne sont conservés que les dialogues indispensables à la compréhension de l’intrigue (tous les récitatifs accompagnés sont bien sûr maintenus) et l’action se retrouve resserrée.
Dans une salle du Staatsoper Hamburg où bien des rangs sont inexplicablement clairsemés, la proposition musicale est de bonne tenue. Ben Glassberg à la tête du Philharmonisches Staatsorchester Hamburg et des chœurs prend beaucoup de soin à rendre lisible la partition et faire en sorte que chaque partie soit bien mise en avant. Les tempi sont appropriés ; le « Parto, parto » est pris très lentement et ponctué de silences bienvenus. On aurait aimé, pour cette aria ô combien attendue, que la clarinette donne l’intégralité de sa partie – aussi  redoutable fût-elle.
William Guanbo Su est parfait en Publio garde du corps. Sa stature aussi imposante que sa voix de basse sonnante fait que le personnage est parfaitement crédible. Il aurait fallu plus de nuances dans le chant de la Servilia d’Olivia Boen, très à l’aise dans son jeu, mais où la ligne de chant reste cantonnée dans le mezzo forte et où la justesse est parfois prise en défaut. Kady Evanyshyn rend bien les tourments qui ne cessent de harceler l’esprit d’Annio. La Vitellia de Tara Erraught est à la hauteur de l’enjeu. Ses deux grandes arias rendent la complexité du personnage avec une autorité de bon aloi. Les graves sont bien posés, la tessiture respectée et elle reçoit de justes ovations à l’issue d’un « Non più di fiori » émouvant. Magnifique Sesto porté par Angela Brower dont le « Parto, parto » est tout empreint des nuances attendues. Enfin le Tito d’Oleksiy Palchykov est à la fois l’ambitieux conquérant et le potentat défait, incapable de se sortir seul des difficultés où il est intriqué. Le premier acte est moins réussi que le second, faute à une voix manquant singulièrement de souplesse (quasiment sans vibrato dans les aigus forte). La seconde partie est très réussie à l’image d’un « Se all’impero, amici miei » de toute beauté.

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Opera seria en deux actes
Musique de Wolfgang Amadeus Mozart sur un livret de Caterino Mazzolà d’après Metastase et la Vie des douze Césars de Suétone
Création le 6 septembre 1791  au Théâtre Stavovské divadlo à Prague

Détails

Mise en scène
Jetske Mijnssen
Décors et costumes
Ben Baur
Lumières
Bernd Purkrabek

Tito
Oleksiy Palchykov
Sesto
Angela Brower
Annio
Kady Evanyshyn
Servilia
Olivia Boen
Vitellia
Tarra Erraught
Publio
William Guanbo Su

Chœur du Hamburgische Staatsoper
Chef des chœurs
Eberhard Friedrich
Philharmonisches Staatsorchester Hamburg
Direction musicale
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Hambourg, Staatsoper
Mardi 22 octobre 2024, 19h

 

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