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ROSSINI, Stabat Mater — Saint-Denis

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Spectacle
13 juin 2017
Messe ou opéra ? L’important n’est pas là

Note ForumOpera.com

2

Infos sur l’œuvre

Sequenza liturgica in musica per solisti, coro e orchestra (1842)

Détails

Joyce El-Khoury, soprano

Karine Deshayes, mezzo-soprano

Edgardo Rocha, ténor

Sergey Artamonov, basse

Les Eléments

Orchestre de Chambre de Paris

Direction musicale

Daniele Rustioni

Festival de Saint-Denis, Basilique, 13 juin, 20h30

Pas une saison sans que le Stabat Mater de Rossini n’occupe l’affiche. Depuis la première exécution de l’œuvre dans sa version définitive à Paris en 1842, où d’après les Frères Escudier, le nom du compositeur fut scandé dans un tonnerre d’applaudissement (sic) et trois numéros bissés, le succès ne se dément pas, n’en déplaise à Richard Wagner qui, au lendemain de la création, fulminait : « C’est inconcevable ! Il [Rossini] n’en finira donc jamais d’être à la mode ! ». D’autres emboîtant le pas au compositeur allemand qualifièrent la partition d’opéra en vêtements sacerdotaux. Cette ambivalence entre théâtre et foi au sein de la partition sert souvent d’angle d’analyse. A Saint-Denis, dans le cadre d’un festival riche comme chaque année d’une programmation abondante, en un lieu sanctifié par l’histoire, tel n’est pas le cas.

A la tête de l’Orchestre de chambre de Paris, la direction de Daniele Rustioni a en effet pour première caractéristique de rendre inutile un débat dont l’issue finalement nous est indifférente. Musique sacrée ou non, peu importe lorsque l’œuvre est ainsi dirigée d’une main de fer dans un gant de velours, aussi attentive à l’effet qu’à la pensée, équilibrée car affidée à la scansion impérieuse d’un geste cependant dominé et, en même temps, respectueuse des nuances nécessaires à l’introspection religieuse. Là où certains s’emploient à relier les séquences pour installer une tension et imposer un semblant d’unité à des humeurs pourtant contrastées, Daniele Rustioni au contraire détache chaque numéro, exception faite des deux derniers. Comment dans ce finale ne pas résister à la tentation dramatique de l’enchainement. Las, les contours de la fugue se diluent dans une acoustique trop réverbérée pour que l’on en perçoive nettement les entrelacs. Les artistes du chœur de chambre les Eléments ne sauraient être mis en cause, eux qui dans la séquence précédente – « Quando corpus morietur » – font montre d’une cohésion indéfectible avec cette gageure de renvoyer une image sonore dont l’oreille saisit tout à la fois l’ensemble et les éléments qui la composent – d’où peut-être le nom de la formation.

Equilibre aussi au sein des quatre solistes dont aucun lorsqu’ils sont réunis ne prend le pas sur l’autre. Tous, à l’exception de Sergey Artamonov, ont le bel canto romantique pour cœur de répertoire. De fait, la basse russe, qui remplace Erwin Schrott initialement prévu, passe à côté du « Pro peccatis suae gentis ». Non que la voix soit bousculée par une écriture pourtant large – elle en assume au contraire l’étendue qui fait cette partie parfois confiée à un baryton – mais héroïsme et lyrisme se toisent sans dialoguer.

Contraltino familier des rôles haut perchés, Edgardo Rocha n’a a priori pas à redouter ce morceau de bravoure qu’est le « Cujus animam ». Le contre-ré bémol final reste certes un obstacle que le ténor franchit avec une appréhension audible et le timbre pincé peut déconcerter ceux qui ne sont pas habitués à ce type de voix, si l’on en juge aux commentaires à la sortie du concert. Mais, ces réserves exceptées, rien ne vient entraver un chant dont l’éclat se satisfait du caractère fanfaron de l’air.

Pour dresser une chapelle ardente au sein de l’« Inflammatus », Joyce El-Khoury doit renoncer à cette douceur dont, à Bordeaux dans Les Pêcheurs de perles, elle faisait usage, émaillant le rôle de Leila d’aigus filés interminables, augmentés ou diminués selon l’effet recherché. Ici, l’agitation fiévreuse de l’orchestre et le style déclamatoire imposent s’assumer les changements de registre avec des couleurs écarlates, pas toujours flatteuses, compensées par un aigu tranchant comme une lame.

Déstabilisée de prime abord par une partition qui la pousse dans ses retranchements les plus graves, Karine Deshayes parvient à conjurer les allures de berceuse que prend parfois le « Fac, ut portem ». Maîtrise du style, du souffle, musicalité, reflets mordorés d’une étoffe veloutée, oui et plus encore, le cœur qu’elle met à l’ouvrage, cet amour porté à la partition, visible même quand elle ne chante pas et transmis tout au long de la soirée avec une générosité dont nous lui sommes reconnaissant.

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Joyce El-Khoury, soprano

Karine Deshayes, mezzo-soprano

Edgardo Rocha, ténor

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