Opera seria assez méconnu de Rossini, Ricciardo e Zoraide a pourtant rencontré un succès fulgurant, qui s’est éteint aussi vite qu’il s’est propagé.
C’est alors qu’il se trouve chez lui, à Pesaro, que le jeune prodige (il a 26 ans et déjà de nombreux triomphes derrière lui) commence à écrire cette nouvelle œuvre au printemps 1818 pour le San Carlo de Naples. Il se base sur un poème épique de Niccolò Forteguerri, dramaturge un peu oublié, mort en 1735. L’argument de ce poème, « Il Ricciardetto » (le petit Richard), est aménagé par le marquis Berio di Salsa, qui en tire une série de péripéties en Nubie, avec tout ce qu’il faut de chassés-croisés sentimentaux.
Agorante, le roi local, revient dans sa capitale, victorieux de son ennemi le roi Ircano, dont il a capturé la fille, Zoraide, à laquelle il n’est par ailleurs pas indifférent, à la grande fureur de sa première épouse Zomira. Zoraide, elle, espère que son fiancé Ricciardo, un chevalier chrétien, viendra la délivrer. Ce dernier essaie en effet d’intervenir, déguisé en faux guide aux côtés de l’ambassadeur des Chrétiens, Ernesto. Habile négociateur, ce dernier obtient d’Agorante la libération des prisonniers, exceptée Zoraide, évidemment. Mais celle-ci rejette le roi nubien, réitérant son amour pour Ricciardo.
Ricciardo, toujours déguisé, demande alors audience à Agorante et lui raconte que Ricciardo aurait également volé sa propre femme. Il demande vengeance et Agorante l’envoie auprès de Zoraide pour qu’il raconte à la jeune femme combien ce Ricciardo est un vilain. Les deux amoureux se retrouvent donc, mais ils sont espionnés par la jalouse Zomira. Bientôt, Agorante sait tout et condamne tout ce petit monde à mort, avec Ircano, le père de Zoraide venu la sauver, mais lui aussi capturé. Ça sent donc très mauvais pour les infortunés. Mais Ernesto arrive alors avec l’armée des Chrétiens. La bataille tourne à leur avantage et au moment où Agorante va être tué, c’est Ricciardo qui le sauve. Plus rien ne peut alors empêcher le mariage de Ricciardo et Zoraide, et tout se termine dans la joie.
Rossini déploie toutes ses ressources dans la partition, très riche et brillante avec de nombreux ensembles très efficaces. Elle lui assure le succès, malgré une série de déconvenues dans les préparatifs, y compris l’indisposition de sa future épouse, Isabella Colbran, créatrice du rôle de Zoraide. L’œuvre est pourtant restée dans les bibliothèques des théâtres lyriques sans en sortir pendant plus d’un siècle et demi, avant que quelques productions, en premier lieu à Pesaro, ne la raniment enfin, y compris cette année, avec notamment Juan Diego Flórez dans le rôle-titre. La première, en 1990, mise en scène par Luca Ronconi, était des plus kitsch, mais dirigée rien moins que par Riccardo Chailly
Mais c’est grâce à l’indispensable label Opera Rara que nous détenons depuis presque 25 ans une intégrale de grande qualité au disque. En voici un extrait, avec le quatuor « Contro cento » du second acte, qui réunit Bruce Ford, Nelly Miricioiu, William Matteuzzi et Alastair Miles, sous la baguette de David Parry à la tête de l’Academy of St Martin in the fields.