Au moment où les tueries parisiennes eudeuillent la France et le monde, Jos van Immerseel anime deux soirées de schubertiades. Autour de lui, ses complices intrumentistes, puisque des pièces de musique de chambre alternent avec les lieder, et trois de ses chanteurs habituels. Thomas Bauer, particulièrement familier de ce répertoire qu’il affectionne, nous offre, outre quelques classiques (« Der Wanderer », « Im Walde », « An dier Musik »…) trois airs dramatiques italiens, écrits pour le célèbre Lablache, qui sont un régal. Tour à tour une cavatine, puis un récitatif et air dramatique, enfin une aria bouffe (D 902a, b et c) suffiraient à convaincre des qualités d’un Schubert servant l’opéra italien. La puissance, l’agilité, la verve, le comique, l’émotion, tout est là, illustré à merveille par chanteur-acteur de premier plan. Marianne Beate Kielland, splendide mezzo, ne nous propose que des chefs-d’oeuvre (« An Sylvia », « Der König in Thule », « Du liebst mich nicht », « Der Tod und das Mädchen »…), de façon magistrale, avec la plus large palette expressive. C’est dans la grande ballade dramatique « Der Zwerg » qu’elle atteint des sommets. Le souffle est long, les couleurs subtiles, les qualités d’émission nous ravissent. Quant à Yeree Suh, que l’on découvre dans ce répertoire, dès « Die junge Nonne », elle convainc. De belles couleurs, le modelé et la conduite de la ligne , l’intelligence du texte, que l’on retrouve ensuite dans « Nacht und Träume ». « Gretchen am Spinnrade » souffre un peu du tempo rapide imposé par le piano-forte. Le magnifique instrument, d’après Graf, 1826, donne toute sa saveur à ces lieder, malgré une balance qui le place en retrait. Les enregistrements la rétabliront, sans aucun doute.
Dijon, Auditorium, les 13 et 14 novembre 2015, 20 h.
