Que deviennent les contre-ténors quand ils atteignent la soixantaine? interrogeait il y a quelques mois Laurent Bury à propos de Jochen Kowalski (voir brève du 7 octobre 2014). Réponse : ils animent les « after » classiques du festival de Bad Kissingen. Après le concert, à 22h30, on s’installe aux tables du Kurgarten Café, disposées comme un banquet en quatre rangées, perpendiculaires à une estrade de fortune, et on commande des Ofenfrische Quiche ou des Mozzarellabällchen que l’on arrose de bière et de vin blanc tandis qu’une sorte de revue musicale anime les agapes. Vendredi 26 juin, c’est Jochen Kowalski qui jouait les maîtres de cérémonies. Aidé d’un micro, celui qui fut un Orfeo de Gluck recherché dans les années 1980 alterne les standards, quelque part entre Helmut Berger dans Les Damnés de Visconti et Michel Serrault dans La Cage aux folles. Haendel succède à Cole Porter dans une reprise jazzy de « Chi perde un momento », extrait de Giulio Cesare. La voix de contre-ténor peut s’autoriser toutes les facéties puisqu’elle est sonorisée, jusqu’à jouer non sans humour des écarts de registre entre fausset et baryton. Clarinette et violon racontent le ciel de Paris. « Wien, Wien nur du allein » tire la couverture à l’est. La danse espagnole de Falla achève de brouiller les repères. Où sommes-nous ? Quand sommes-nous ? On ne racontera pas comment la soirée s’est terminée car, lost in translation in MittelEuropa, on n’a pas attendu la fin du concert pour aller se coucher.
Bad Kissingen, Late Night Concert, Joken Kowalski (contre-ténor), Saloner Unter’n Linden der Staatskapelle Berlin, vendredi 26 juin, 22h30
