Peindre à deux sur le même tableau : c’est avec cette image, ou avec la formule qui donne son titre à cette brève, que Richard Peduzzi tente de résumer sa collaboration artistique avec deux des plus grands metteurs en scène de théâtre et d’opéra de la fin du XXe siècle, Patrice Chéreau et Luc Bondy. Dans un volume qui ressemble à des mémoires, le peintre et décorateur revient sur sa déjà longue carrière au service des plus grands compositeurs. Les Contes d’Hoffmann et Lulu à l’Opéra de Paris, le Ring de 1976 à Bayreuth, Wozzeck au Châtelet, Lucio Silla et Tristan et Isolde à Milan, Le Tour d’écrou, De la maison des morts et Elektra à Aix-en-Provence : autant de spectacles qui ont marqué les dernières décennies, notamment grâce à leur identité visuelle. Abondamment illustré, de photographies mais aussi de dessins et esquisses, le livre que proposent en cette rentrée les éditions Actes Sud apporte sa contribution à l’hommage unanime à Patrice Chéreau (l’un des chapitres figurait d’ailleurs en partie dans le numéro spécial que L’Avant-Scène Opéra lui a consacré), mais il rappelle aussi ce que le monde lyrique doit à Richard Peduzzi, les nouveaux aménagements de la Bibliothèque de l’Opéra de Paris, par exemple. On y retrouve, pour évoquer Bayreuth, un texte signé en octobre 1979 pour le livre Histoire d’un Ring. Et l’on apprend ailleurs que les décors du Crépuscule des dieux furent conçus en écoutant du jazz : « j’ai trouvé plus d’inspiration en écoutant Coltrane ou Mingus qu’en m’étourdissant, à la recherche de la juste interprétation de la mythologie germanique, avec la musique – pourtant sublime – de Wagner ».
Richard Peduzzi, Là-bas, c’est dehors, sous la direction de Claire David, préface d’Henri Loyrette, postface de Charlotte Chastel-Rousseau. Actes Sud, 2014, ISBN 0298-0592, 42 euros