Éric-Emmanuel Schmitt © Albin Michel, Catherine Cabrol
Pour Eric Emmanuel Schmitt, le mystère de Bizet réside dans un génie à éclipses, le compositeur n’ayant d’après lui rien produit de valable entre la symphonie en Ut (18552) et Carmen (1875), rebaptisé « un opéra dont la musique est de Mozart et le livret de Nietzsche ». Tel était le propos de la soirée organisée Salle Gaveau, vendredi dernier, 14 février. Au delà de l’amateurisme de la présentation, illustrée par quelques œuvres pour piano, des réductions d’airs d’opéra et même une transcription incongrue pour hautbois et piano du thème de l’andante de la symphonie, la thèse fait peu de cas de l’œuvre du pauvre Bizet lui-même. Les pêcheurs de perles sont à peine cités, tandis que L’Arlésienne est passée sous silence, tout comme les Jeux d’enfants ou Patrie… Dans ces conditions, de longs extraits de Carmen, opéra sur lequel s’étend complaisammment Eric Emmanuel Schmitt exposent surtout la gêne manifeste de Karine Deshayes, et la voix trop claire de Philippe Do, qui ne parvient jamais à rendre crédible son incarnation de Don José. Quant au malheureux Nicolas Stavy, il joue les utilités comme un accompagnateur de classe de chant. A qui s’adresse un tel spectacle ? Sans doute pas aux amoureux de Bizet devenu un personnage de médiocre roman. Tant qu’à vouloir renouveler la forme du concert classique, on aura trouvé « le pianiste aux cinquante doigts » évoquant la vie de Cziffra sous les traits de Pascal Amoyel autrement plus réussi. [Jean-Claude Hulot]