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Plus d’un demi-siècle avant que Cecilia Bartoli revisite le répertoire de Maria Malibran, Sacha Guitry avait choisi de rendre hommage à celle dont, selon lui, la vie fut une suite de voyages. « Et sa brève existence pourrait se résumer ainsi : Espagnole, née à Paris, elle débute en Italie, poursuit sa carrière à Londres, épouse un Français à New York, puis se marie avec un Belge et meurt à Manchester. Elle sera née, elle aura vécu et elle sera morte en tournée ». Tel est l’argument de La Malibran, film qu’il réalisa en 1943 et pour lequel il avait décidé d’engager non pas une actrice, mais une chanteuse, la toute jeune Geori Boué qui venait de faire ses débuts à l’Opéra de Paris un an auparavant. Sorti en mai 1944, le film eut une courte carrière en salles, puisqu’à la Libération, Guitry fut arrêté et l’exploitation de toutes ses œuvres suspendue puis interdite. Geori Boué a aujourd’hui 95 ans et, dans un livre publié par les éditions La Tour Verte, elle livre tous ses souvenirs de son unique incursion dans le septième art. Sacha Guitry ayant voulu tourner sans play-back, la soprano devait à chaque prise chanter en direct les différents airs constituant la bande-son. Sacha Guitry lui-même tenait le rôle de François-Eugène Malibran, l’antipathique mari, et, pour incarner le violoniste Charles de Bériot, l’autre homme de la vie de Maria Malibran, il avait choisi un chanteur, Jacques Jansen, « quelqu’un d’assez prétentieux », nous apprend Geori Boué, qui aurait bien pu devenir la nouvelle Madame Guitry si elle ne s’était éprise quelque temps auparavant du baryton Roger Bourdin. Outre les souvenirs de la cantatrice, on trouvera une préface due à sa propre fille, la romancière Françoise Bourdin, et d’instructives annexes due à Robert de Laroche, directeur de la collection La Muse Celluloïd. [Laurent Bury]
Geori Boué, Sacha Guitry et La Malibran, Editions La Tour Verte. 128 pages, 16 pages photo, 12,40 € . ISBN : 978-2-917819-16-6