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Il y a quelques jours, en annonçant la saison 2013-14 de Covent Garden, Antonio Pappano a suscité la polémique en revenant sur les soucis que les annulations en cascade ont causés au Royal Opera House. Robert le Diable en a été la principale victime, avec une distribution finale bien différente de celle initialement prévue. Pour le directement musical londonien, c’est la faute aux jeunes chanteurs, une génération de chiffes molles qui annulent pour un oui, pour un non, là où leurs aînés n’auraient renoncé à chanter que s’ils avaient été cloués au lit par une maladie grave. Pourtant, « Tony » a lui-même évoqué une autre raison possible : de nos jours, on a pris l’habitude de donner les opéras en version archi-intégrale, en renonçant à toutes les coupures « traditionnelles » : « de sa vie, Maria Callas n’a jamais chanté une Traviata complète ». Ce serait donc aux chanteurs de mieux gérer leur agenda et de prévoir de plus grandes périodes de repos. Là-dessus, Fabio Luisi, à New York, riposte : Non, c’est la faute aux agents. Les chanteurs, trop jeunes, pas assez aguerris, se laissent persuader trop tôt d’aborder des rôles trop lourds. Et le critique Norman Lebrecht d’enchaîner : Non, c’est la faute aux metteurs en scène, parce qu’ils veulent des chanteurs qui aient le physique du personnage, donc on fait la chasse aux grosses dames, on veut des Brühnnhilde filiformes, alors les carrières sont brèves parce que les voix se fatiguent vite. Mais au fond, le débat ne date pas d’hier, et ne touche pas que la jeune génération, car déjà dans les années 1980, ce bon mot circulait parmi les abonnés du Met : « Cette saison, Madame Caballe sera disponible pour un nombre limité d’annulations… » [Laurent Bury]