Andreea Soare © Jean-Pierre Ronnay
Rien ne laissait présumer que la soprano Andreea Soare possèderait cette sensibilité si particulière, requise pour franchir cet Himalaya vocal que sont les Quatre derniers Lieder de Strauss : pas plus son titre de lauréate du Concours international de Chant de Clermont-Ferrand en 2011 que sa très remarquée prestation Aixoise qui suivit dans des airs d’opéra de Mozart – prestation couronnée par le Prix des « Amis du Festival ». Invitée par le Centre Lyrique d’Auvergne dimanche à la Maison de la Culture de Clermont-Ferrand, elle est apparue en interprète aussi attentive à traduire la mélancolie straussienne que désireuse de nous en faire partager l’émotion en dehors de toute emphase. Souplesse de l’émission, ligne vocale d’une ductilité empreinte d’une profonde ferveur, maîtrise d’un phrasé lumineux impeccablement inspiré : Andreea Soare fait bien plus que transcender la poésie. L’exquise délicatesse de son sens mélodique sublime cette partition bien au-delà de sa littéralité. La gravité du propos se teinte d’une subtile transparence. Soare perçoit au superlatif, mais sans outrance dans la gravité, cette lenteur extatique, ce long étirement de l’instant presque à la limite de l’immobilité. Etonnante aussi d’acuité et de souffle visionnaire est apparue la direction de Takashi Kondo à la tête de l’Orchestre Sostenuto. Une formation composée d’élèves de dernier cycle de grandes écoles et conservatoires européens, tous impressionnants de maturité, notamment Arnaud Pieniezny, magistral dans l’Adagio appassionato op.57 de Bruch qui précédait. La conduite volontaire et architecturée du chef franco-japonais insufflait un salutaire dynamisme chromatique et une éloquence musicienne contagieuse, tant à Strauss qu’à la 2e symphonie de Brahms donnée en seconde partie. [Roland Duclos]