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Vous pensiez que l’époque des éreintements ignobles était révolue ? Vous pensiez qu’on ne reviendrait jamais au bon vieux temps où l’on pouvait stigmatiser telle musique comme « judaïque », telle autre comme « efféminée » ? Eh bien détrompez-vous, car il existe apparemment des nostalgiques qui n’attendent qu’une occasion pour ressortir de derrière les fagots des critères aussi pertinents en matière de jugement esthétique. A Milan, Stéphane Lissner a pris la décision de bannir de La Scala le vétéran de la critique musicale italienne, Paolo Isotta. Que ce monsieur ait jadis qualifié Pavarotti d’illettré musical, on pouvait le comprendre même si l’attaque n’était pas très fine. Mais voilà qu’il juge à présent dans le Corriere delle Sera que Daniel Harding avait dirigé le Prélude et mort d’Isolde avec une mollesse susceptible de confirmer la thèse selon laquelle Wagner était homosexuel. Aurait-il mieux valu répondre par le mépris à un verdict aussi musicologiquement pénétrant ? [Laurent Bury]