En complément des représentations d’Alcina mise en scène par David Alden, l’Opéra national de Bordeaux reprenait ce week-end, salle Vitez, Orphée et Eurydice déjà proposé à Bobigny la saison dernière par l’Atelier Lyrique de l’Opéra national de Paris (voir brève du 5 mars 2011). La mise en scène de Dominique Pitoiset et Stephen Taylor veut nous rendre plus proche le chef d’œuvre de Gluck, proposé ici dans la version Berlioz. C’est donc en voisins que nous sommes invités à prendre part à la douleur d’Orphée pleurant Eurydice dans les deux pièces d’un appartement à l’ameublement contemporain. Le principe se défendrait s’il n’altérait la lisibilité du drame. Bien malin celui qui a pu comprendre la quête d’Orphée, entre chambre et séjour, sans avoir connaissance du synopsis de l’opéra. Encore plus malin celui qui a pu saisir un seul mot du livret de Pierre-Louis Moline. Pas une seule des chanteuses réunies ce samedi 12 mai ne maitrise la déclamation du chant français. Disqualifiant quand on sait qu’il s’agit là de l’essence même de l’ouvrage, révolutionnaire par la primauté qu’il offre à la parole, en réaction à l’opera seria. Et préoccupant de la part de jeunes artistes formées dans l’une des premières écoles d’art lyrique française. Indépendamment de la diction, la préparation technique, ne serait-ce que du rôle-titre, parait insuffisante pour affronter une partition revue par Berlioz à la dimension de Pauline Viardot. La fosse profonde de la salle Vitez place l’orchestre très en retrait par rapport aux voix. Est-ce la raison pour laquelle la direction de Geoffroy Jourdain semble manquer d’arête ? L’intervention d’un chœur réunissant les forces de l’Opéra et du Conservatoire, remarquable de cohésion sonore et dramatique, n’empêche pas la représentation de laisser perplexe. Christophe Rizoud
Christoph Willibald Gluck : Orphée et Eurydice. tragédie-opéra en 3 actes (1774), version française revue par Hector Berlioz. direction musicale : Geoffroy Jourdain. Mise en scène : Dominique Pitoiset et Stephen Taylor. Scénographie : Dominique Pitoiset. Costumes : Axel Aust assisté de Camille Pénager. Lumières : Christophe Pitoiset. Production de l’Atelier Lyrique. Orchestre Symphonique du conservatoire de Bordeaux Jacques Thibaud. Ensemble vocal du Conservatoire de Bordeaux. Choeur de l’Opéra national de Bordeaux, direction Alexander Martin. Agata Schmidt (Orphée), Ilona Krzywicka (Eurydice), Olivia Doray (Amour). TnBA, grande salle Vitez, samedi 12 mai 2012, 20h30.