Ce samedi soir, c’est la fête à l’Opéra Comique. Toutes les vieilles cires se sont mises sur leur trente-et-un, les films nitrate sont restés à la porte (l’Opéra-Comique a déjà brûlé deux fois, ça suffit comme ça !) et l’écran immaculé a remplacé les décors de toiles peintes. Suivant la voie ouverte par l’Auditorium du Louvre avec ses « musiques filmées », l’Opéra-Comique propose d’évoquer le temps d’une soirée, à l’aide d’archives cinématographiques, les heures glorieuses de cette maison qui vit l’insuccès de Carmen et la bataille de Pelléas (voir brève).
Benoît Duteurtre, très agréable maître des cérémonies (un petit détail, cher Benoît, Werther a été créé à Vienne – en allemand – et non pas à l’Opéra Comique), s’est plongé avec Pierre Philippe et avec délices dans les archives Gaumont Pathé : courtes scènes arrachées aux actualités, à des films à scénario, à de petits films des années 1898, certains sonorisés avec les enregistrements gravés par les même artistes : le résultat est magique.
La soirée est organisée en thèmes parmi lesquels : la diva bien sûr, les vedettes, le répertoire, l’effort de guerre (1914-18), le front populaire, mai 68… A l’applaudimètre, Ninon Vallin et Georges Thill l’emportent haut la main. Mais quelle émotion aussi de voir revivre devant nous d’autres grandes figures mythiques de l’Opéra Comique, Marthe Chenal, Jean Périer, Gustave Charpentier, André Pernet, Vanni-Marcoux, Edmée Favart, Bétove, et bien sûr Gabriel Bacquier.
Interminables ovations pour notre grand baryton venu raconter avec son habituelle faconde quelques souvenirs de la troupe de l’Opéra Comique, dont il a longtemps fait partie, et en même temps regretter sa disparition au début des années 70 alors qu’elle jouait un rôle incomparable dans la formation des jeunes chanteurs. Les airs interprétés entre les projections ont constitué la partie plus faible de la soirée, malgré le talent de Lionel Peintre et celui de l’orchestre Philarmonique de Radio France fort bien dirigé par Frédéric Chaslin : choix d’airs trop difficiles ou chanteurs pas assez aguerris, Clémence Barrabé et Julien Dran ne nous ont pas convaincu.
Il n’en demeure pas moins que ce florilège donne envie d’en voir plus : pourquoi ce rendez-vous exceptionnel ne deviendrait-il pas régulier ? Une bonne nouvelle en réponse immédiate : l’Opéra Comique confirme qu’une forme de ciné-club présentant des versions filmées d’opéras comiques et d’opérettes va être organisée à partir de la saison prochaine. De belles redécouvertes en perspective. [JMH]
Cette soirée à l’Opéra Comique (samedi 10 mars à 20 h), enregistrée par France Musique, sera diffusée le 30 avril 2012.