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Xerxès, ses amours, ses batailles et son gros platane

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Actualité
13 novembre 2017
Xerxès, ses amours, ses batailles et son gros platane

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Alors que l’Opéra Royal de Versailles s’apprête à donner le 19 novembre prochain une luxueuse version de concert de Serse, demandons-nous si le roi achéménide qui inspira l’opéra de Haendel était aussi insupportable en politique qu’en amour.

Lorsqu’en 1738 Handel donne son Serse au King’s Theater de Londres, il vient d’enchaîner les échecs et les déboires amoureux du roi oriental ne seront pas davantage applaudis. Cinq représentations seulement pour ce qui est aujourd’hui l’une des œuvres les plus jouées de son compositeur. Comme le souligne très bien Piotr Kaminski (Mille et un opéras, Editions Fayard), par un tour de génie, Handel compose une musique fortement inspirée de l’opéra du XVIIe siècle (airs très courts et nombreux, confusion permanente entre récitatifs et arias, personnage truculents…), et livre une de ses œuvres les plus modernes !

Le livret d’abord écrit pour Cavalli a été remanié par Silvio Stampiglia pour Bononcini, et c’est un librettiste resté inconnu qui livre une nouvelle adaptation pour Handel. Mais le fait que Stampiglia soit passé par là indique déjà à quelle moulinette cette figure historique va être croquée. Comme dans Partenope, Silvio Stampiglia aime à railler les figures historiques et rapprocher ces nobles personnages de notre condition quotidienne souvent ridicule. Ce n’est donc pas un hasard s’il a choisi rien moins que Xerxès Ier pour sa nouvelle farce. Dans la réalité, Xerxès n’avait sans doute rien d’un amant niaiseux qui déclare son amour à un platane (l’aussi célèbre que mal compris « Ombra mai fù ») avant de jeter son dévolu capricieux sur la fille de son chef des armées. Toute cette mascarade amoureuse est parfaitement inventée, mais la placer chez les Perses lui donne un parfum exotique qui sera bientôt celui des turqueries.

Qui était Xerxès Ier ? Un roi plutôt effrayant, nous disent les historiens grecs, et pour cause : il a d’abord pacifié l’Egypte (sans doute la malheureuse Amestris, Amastre dans l’opéra, princesse d’Egypte, a-t-elle été séduite et délaissée à ce moment-là) puis, pour venger l’affront fait à son père Darius Ier lors des premières guerres médiques, il lance une nouvelle attaque contre Athènes et les cités grecques en 480 av. J.C. Pour faire franchir à son armée l’Hellespont (actuel détroit des Dardanelles), il attache les 1200 bateaux de sa flotte. Après une première tentative infructueuse, il fait fouetter la mer pour la punir et la rendre plus docile ! Son invasion de la Grèce donnera lieu à deux des épisodes les plus connus de l’Histoire antique : la bataille des Thermopyles d’abord où 300 spartiates bloquèrent plusieurs dizaines de milliers de soldats mèdes pendant trois jours, laissant le temps aux autres cités grecques d’organiser leur défense. Ils pourront ensuite repousser l’envahisseur grâce aux victoires de Salamine et Platées, où la ruse de Thémistocle a piégé le roi achéménide, qui avait tout de même eu le temps d’incendier Athènes en passant. Après ces défaites, Xerxès se retire à Suse, c’est sans doute à cette période que se déroule l’opéra. Il est assassiné en 465, suite à un complot fomenté par son ministre Artaban.

Moins populaire à l’opéra que son son fils Artaxerxés (Artaserse) ou son lointain successeur sassanide Kavadh II  Shiriyih (Siroe), il vient, avec son père Darius I (Dario) grossir les rangs des rois achéménides dont l’opera seria aimait à conter les aventures amoureuses. La période contemporaine n’a pas été beaucoup plus respectueuse à son égard : le film 300 de Zach Snyder, le transforme en effrayante drag queen dont la vilénie décadente est proportionnelle au nombre de ses bijoux, surtout comparé à ses ennemis spartiates, plutôt du genre gym queen, une cape, un slip et puis c’est tout. Xerxès se confrondrait-il aujourd’hui avec les cruelles furies qu’il appelle dans sa rage à la fin de l’opéra ? Voici cet air interprété comme jamais par Ann Murray et Sir Charles Mackerras à la tête de l’orchestre de l’English National Opera dans la traduction anglaise de l’œuvre.

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