Loin de retomber, le débat monte autour de la défiguration du Palais Garnier. La pétition lancée voici une semaine a recueilli plus de 21 000 signatures (ce jour à 17h). Elle a suscité l’émotion hors de nos frontières. Les médias ont fait part de leur étonnement et de leur inquiétude. La très puissante Société de Protection du Patrimoine et de l’Esthétique Français (SPPEF) d’Alexandre Gady et la très dynamique association Urgences Patrimoine ont emboîté le pas à l’Académie des Beaux-Arts et à Hugues Gall pour protester contre ce projet.
Dans le même temps, les arguments de la direction de l’Opéra ont fondu les un après les autres : l’argument économique s’est révélé inconsistant tant la recette attendue des 30 nouveaux sièges est dérisoire (du reste, l’Opéra ne sait même pas la chiffrer !) ; l’argument de l’acoustique n’est étayé par aucune étude précise ; l’argument de la meilleure visibilité s’effondre quand on voit l’entassement de fauteuils dans les « nouvelles » loges ; « l’accord de principe » donné par la DRAC semble n’avoir rien de commun avec un accord véritable et valide ; la prétendue « restauration nécessaire » est un leurre puisque cette restauration repose sur un programme établi depuis des années, bien avant l’actuelle direction ; enfin, l’idée selon laquelle Garnier voulait lui-même qu’on enlève ces cloisons est une fantasmagorie de technocrate n’ayant jamais pris le temps de lire les écrits de Garnier.
Un directeur de l’Opéra de Paris ne saurait veiller personnellement à tout : il est très probable que Stéphane Lissner n’a pas diligenté lui-même ces travaux mais a laissé faire ses services. De même, le théâtre qu’il a fait construire à Aix et le soin qu’il a pris de La Scala attestent qu’il fut un usager avisé. Aussi, on ne saurait comprendre qu’il continue à défendre (certes mollement et même avec embarras) un projet qui indigne tant de gens, et qui de toute évidence a été bâclé. Personne n’en voudra à Stéphane Lissner de revenir sur ce projet qui n’est pas viable et ne repose sur aucune motivation sérieuse. Il se grandirait au contraire à rendre ces loges à leur état premier. Il se nimberait ainsi de l’aura de Titus au lieu de se charger des vapeurs de Néron.