C’est en tout cas le slogan choisi pour 2024-25 et sans doute le vœu du directeur, Alexander Neef, qui a su avec son équipe remettre la Grande Boutique à flot. Ça se fête : la maison (toutes activités comprises) présente un bénéfice net pour cette saison ; cela ne s’était pas vu depuis 2017. Le programme a donc sûrement été pensé pour éviter les embardées (économiques) et pouvoir continuer à afficher un taux moyen de remplissage de quatre vingt treize pour cent dans les deux salles, Garnier et Bastille, (au prix d’un certain conformisme).
Ce nouveau programme lyrique, me direz-vous, donne-t-il quand même envie d’aimer, chanter et danser ? Dix-neuf spectacles (un de plus), et comme pour cette saison, sept nouvelles productions sont attendues. Si la volonté affichée est de présenter un fonctionnement plus conforme aux ambitions vertes de toute bonne entreprise, on ne sera pas autrement surpris en 2024-25 de revisiter un panorama assez large (pour ne pas dire très éclectique) de l’opéra français, de Jean-Philippe Rameau (Castor et Pollux vu par Peter Sellars associé au chef Teodor Currentzis) à Pascal Dusapin (Il Viaggo, Dante au livret en italien (quand même), une commande de l’OnP associé au Festival d’Aix, et une recréation parisienne par Kent Nagano et l’inévitable Claus Guth). Si les chef(fe)s et artistes français sont très présents la saison prochaine (sans oublier la troupe maison formée de huit chanteurs), ces œuvres seront portées par des équipes internationales. Vous retrouverez les Gounod (Faust avec Pene Pati, John Relyea et Marina Viotti), Massenet (Manon avec Nadine Sierra et Benjamin Bernheim, Amina Edris et Roberto Alagna) et autres Debussy. Pelléas et Mélisande sera l’occasion de juger du travail inédit de Wajdi Mouawad mettant en scène Sabine Devieilhe (qu’on aurait aimé d’ailleurs voir dirigée par un chef français ?). Amateur(e) d’Offenbach ? Vous aurez droit à une nouvelle production pensée par Barrie Kosky (avec les chefs Stefano Montanari, Michele Spotti) des Brigands (œuvre déjà donnée il y a trente ans). Certains se désoleront (à juste titre) de ne pas pouvoir applaudir Orphée aux enfers ou La Belle Hélène, qui eux n’ont jamais été donnés.
Si vous préférez les Italiens, vous ne serez pas déçus avec trois Verdi en trois reprises (Don Carlos avec Marina Rebeka, Rigoletto dirigé par Domingo Hindoyan – par Krzysztof Warlikowski pour le premier et Claus Guth pour le second, souvenez-vous – et un Falstaff plus ancien dû à Dominique Pitoiset, dirigé cette fois par l’excellent Michael Schønwandt). Deux Puccini sinon rien, avec le retour wilsonien de Madama Butterfly (et les débuts in loco d’Eleonora Buratto sans oublier la joie d’entendre Aude Extrémo) et un nouveau Trittico (Christof Loy, Carlo Rizzi) dont l’intérêt principal sera d’entendre Asmik Grigorian. La surprise ne sera pas grande de retrouver aussi du Bellini (Les Puritains) avec Lisette Oropesa, du Donizetti (La Fille du régiment avec Julie Fuchs) et du Rossini avec son Barbier dans la production excitante de Damiano Michieletto.
Pas de saison sans Mozart (avec la belle Flûte de Robert Carsen) dirigé par la cheffe ukrainienne Oksanna Lyniv, ni sans Janacek (La Petite Renarde rusée) ou Stravinsky (The Rake’s progress). Du son neuf (quoique ancien) aussi avec L’Isola disabitata de J. Haydn pour les artistes de l’Académie, et mis en scène par l’ancien danseur du Ballet, Simon Valastro.
Mais pour les wagnéristes ? Les membres de cette secte redoutée ne sont pas oubliés puisqu’une nouvelle Tétralogie sera donnée à Paris. Elle débutera la saison prochaine avec L’Or du Rhin (mais pourquoi devoir attendre trois ans ce Ring qui devrait se voir en deux années maximum ? Et pourquoi pas en deux semaines ?). Décidément Philippe Jordan n’a pas été remplacé et c’est très dommage. Ce sera le fameux Ring commandé avant la pandémie à Calixto Bieito, avec les prises de rôles de Ludovic Tézier (Wotan) et Eve-Maud Hubeaux (Fricka), sous la baguette de Pablo Heras-Casado.
Pour conclure notons que les Mélomanes fêteront avec les artistes de l’Opéra de Paris les 150 ans du Palais Garnier avec un grand gala en janvier 2025.