Quand l’un des meilleurs barytons canadiens d’aujourd’hui chante avec l’un des meilleurs barytons canadiens d’hier, on ne peut s’empêcher de tendre l’oreille. A ceux qui croyaient Gino Quilico définitivement retiré des scènes lyriques, la création de l’opéra Les Feluettes va infliger un démenti d’autant plus sonore que cet artiste aura notamment pour partenaire l’excellent Etienne Dupuis, qui jouera le même personnage avec quarante années de moins. Et si cela ne suffisait pas, l’argument de l’œuvre en question achèverait de retenir l’attention : inspiré d’une pièce de Michel Marc Bouchard (1987) déjà portée au cinéma en 1996 par John Greyson, Les Feluettes se situe dans une prison, où des détenus séquestrent l’évêque Bilodeau pour lui jouer un spectacle évoquant l’histoire d’amour secrète entre deux adolescents, Simon et Vallier. La presse canadienne n’a pas manqué de souligner que, par son sujet, cet opéra s’inscrit en droite ligne dans la filiation du Brokeback Mountain de Wuorinen. Séduit par la pièce, le compositeur australien Kevin March a voulu en tirer sa première grande œuvre lyrique. Et l’on sait déjà que la Canadian Opera COmpany a également commandé à Ana Sokolović un opéra d’après une autre pièce de Michel Marc Bouchard, La Reine-Garçon, sur la vie de Christine de Suède (création prévue à Toronto en 2020). Simple précision linguistique : les « garçons sensibles » sont surnommés au Canada les Fluets, d’où le titre de l’œuvre…
Les Feluettes, du 21 au 28 mai à Montréal, Salle Wilfrid-Pelletier