Jonas Kaufmann suivra-t-il la voie ouverte par Plácido Domingo en s’orientant vers un nouveau répertoire ? C’est en 2009 que le ténor espagnol avait interprété son premier rôle de baryton (si l’on fait abstraction de ses toutes premières années de carrière) : il s’agissait alors de Simon Boccanegra et il avait 68 ans. Le ténor allemand n’en a que 55, mais il vient de faire une jolie surprise au public viennois à l’occasion de l’actuelle reprise d’I Pagliacci où il chante le rôle de Canio et dont la première se tenait ce dimanche. Rappelons que l’opéra débute par un prologue au cours duquel le baryton interprétant le rôle de Tonio (rival amoureux de Canio) chante un air devant le rideau, « Si può? Si può? Signore! Signori! », où il expose que l’auteur a cherché ici à peindre une tranche de vie réaliste. Après le double meurtre de Canio, ce même Tonio conclura « La commedia è finita! », mais, depuis Caruso, la phrase est généralement laissée au ténor (et cette fois-ci également). Jonas Kaufmann avait déjà chanté en récital (et enregistré) l’air de Tonio : cette fois, il l’a interprété scéniquement. Il est ensuite revenu saluer devant le rideau… avec une pirouette. Hormis les artistes (intéressés au premier chef !), il semble que la nouvelle ait été gardée plus ou moins secrète afin de créer la surprise. L’événement a par ailleurs un précédent : José Cura avait accompli le même exploit lors de représentations en 2008.
Pour répondre à la question initiale, le basculement de répertoire de Jonas Kaufmann ne semble toutefois pas d’actualité tant il s’est révélé dans une forme exceptionnelle, tant en baryton… qu’en ténor !