Dans le cadre des différentes initiatives visant l’ouverture à un public plus large, l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège proposait ce samedi une expérience inédite : le West Side Story de Leonard Bernstein (le film de Robert Wise et Jerome Robbins) sur écran géant en version remasterisée, dont la partie orchestrale était interprétée en direct. Une toute nouvelle technologie, développée par Audionamix, permet en effet de dissocier, dans la bande son originale, les pistes vocales du reste des éléments sonores, et donc de fournir une version du film comprenant images, voix, bruitages, dialogues, bref, tout sauf la partie instrumentale. Restait encore à reconstituer le matériel d’orchestre dont l’original était perdu, mais dont subsistaient des bribes éparses dans diverses collections privées.
Si les images du film (1961) ont bien pris quelques rides, le scénario n’a hélas rien perdu de son actualité. La musique de Bernstein hante désormais tous les esprits et fait figure de grand classique.
Bien des mises en scènes d’opéra utilisent abondamment la vidéo ; ce format hybride film/orchestre est une nouvelle étape dans l’intégration des différentes formes d’art. Elle chagrinera peut-être les puristes, mais l’expérience démontre qu’elle est particulièrement efficace pour susciter l’émotion.
Le chef d’orchestre Anthony Gabriele, invité à Liège pour deux soirées et passé maître dans l’art de la synchronisation, réussit à insuffler à ses troupes la rigueur nécessaire, mais aussi le lyrisme, l’enthousiasme très communicatif et l’amour d’une partition exceptionnelle à bien des égards. La fierté et la joie de participer à une telle expérience se lisait sur le visage des musiciens liégeois, réunis en grand effectif pour la circonstance, pour le plus grand plaisir d’une salle comble, très attentive, émue comme jamais par les amours contrariées de Maria et Tony.