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« Ah, nourrice, ah, nourrice, / Si ce gars ne m’aime pas, / J’en mourrai de la jaunisse ». Sont-ce là les paroles d’un opéra-bouffe d’Offenbach ? D’une opérette de Claude Terrasse ? Que nenni : c’est dans La Belle-mère amoureuse, parodie d’Hippolyte et Aricie que Phèdre les chante. Pour la reprise en 1742 du premier opéra de Rameau, créé en 1733, Charles-Simon Favart conçut une parodie qui tournait en dérision les héros antiques, comme le feraient Meilhac et Halévy un siècle plus tard. Le Centre de musique baroque de Versailles a voulu la remonter, mais en l’enrichissant de pages tirées d’autres parodies : le concepteur et metteur-en-scène, le marionnettiste Jean-Philippe Desrousseaux, a emprunté à Riccoboni et Romagnesi, et musicalement, on a rajouté de l’authentique Rameau aux divers couplets sur des airs connus (« J’ai du bon tabac », « Frère Jacques »…). On peut ainsi entendre quelques extraits d’Hippolyte, mais aussi « La Poule », quelques mesures de l’ouverture de Platée, la danse du Grand Calumet de la Paix et autres tambourins, sans oublier « Divinités du Styx », de Gluck ! Aux trois brillants marionnettistes se joignent deux chanteurs, la mezzo Marie Lenormand, qui interprète notamment « Cruelle mère des amours » à côté d’un air de fureur parfaitement bouffon, et le baryton Philippe-Nicolas Martin, un peu moins sollicité en Thésée, même si c’est lui qui écope du fameux air d’Alceste. Les sept musiciens de l’ensemble PhilidOr, mené par la violoniste Mira Glodeanu, se prêtent brillamment au jeu. Hilare, le public de la Salle Favart est conquis, et il devrait en aller de même dans les différentes étapes de la tournée prévue pour ce spectacle (dans les mois à venir, Hardelot, Vichy et Herblay). [Laurent Bury]