« Que tout baise, que tout s’embrase ; / Accourez putains et ribauds » : ce n’est là qu’un échantillon des paroles plus que lestes qu’on pouvait entendre, vendredi 16 septembre, à l’Amphithéâtre de la Cité de la Musique. Sous le titre a priori énigmatique de « La Ménagerie du Sultan », l’ensemble Sinfonie Bohémienne, dirigé par Gilles Thomé, rendait hommage à un grand mécène du XVIIIe siècle : Alexandre-Jean-Joseph Le Riche de La Popelinière (1692-1762), surnommé le Sultan, protecteur de Rameau, entre autres. Et comme ce fermier général est aussi l’auteur d’un ouvrage libertin intitulé Tableaux des mœurs du temps dans les différents âges de la vie, aux musiques interprétées en son château de Passy (la « Ménagerie ») se mêlaient des extraits de ce texte, déclamés par Magali Léger et Arnaud Marzorati. La soprano et le baryton chantaient aussi diverses mélodies aux paroles grivoises, où il est beaucoup question de vit, de con, de foutre et de couilles. De Rameau, on entendit ainsi une réjouissante parodie d’un « air gracieux » de Castor et Pollux, « J’y suis : le sens-tu Phillis ? Oui, Licas, poursuis, Tu te raidis contre l’obstacle » sur l’air « Partez, on languit sur le rivage » des Indes Galantes, et un texte coquin adapté sur le célébrissime « Forêts paisibles » de l’acte des Sauvages. Parmi les instrumentistes, mention spéciale pour le basson volubile de Mélanie Flahaut, et pour le claveciniste Aurélien Delage, qui vers la fin de la soirée délaisse le clavier pour le traverso. Comme le dit la Bourine hollandaise : « Voici de ton instrument l’étui charmant, mon cher amant / Mets-le dedans, fais promptement »… [LB]
Cycle Passions, le désordre amoureux, La Sinfonie bohémienne, Oeuvres de Gossec, Rameau, Rousseau, Stamitz, Telemann, vendredi 16 septembre, Cité de la Musique, Paris.