Qui dit annonce de saison d’opéra dit le plus souvent attirail promotionnel. À chaque saison son thème, son identité graphique, ses notes de mises en scène, ses nombreuses images… Il ne s’agit plus seulement d’annoncer des œuvres, des chanteurs et des metteurs en scène, il s’agit désormais d’imaginer un univers cohérent et, si possible, innovant, voire expérimental.
Lors de l’annonce de sa saison 2023-2024, mardi dernier, la Monnaie a donc dévoilé les œuvres qui seront jouées mais aussi un thème et des images. C’est sous le signe du destin – motif récurrent à l’opéra – que la saison sera placée : « There will be fate ». Et puisqu’il serait effectivement réducteur de cantonner le destin au traitement qu’en font les livrets du 19e siècle, la maison fédérale belge a choisi d’ancrer le thème dans l’actualité la plus vive. Le destin de l’humanité et de l’art est-il de fusionner avec d’autres types d’agents créateurs ? La réponse n’est pas formulée mais elle est clairement posée puisque Peter de Caluwe, directeur de l’institution, explique à France Inter que les images de la saison ont été créées par Dall-E, intelligence artificielle capable de générer des images à partir de consignes écrites, et que certains textes ont été écrits en mobilisant ChatGPT. Il précise qu’il ne s’agit évidemment pas d’exclure les graphistes et rédacteurs du processus de communication. Bien au contraire, la démarche tend à utiliser l’intelligence artificielle pour créer, ce qui est très différent. Ainsi, les artistes impliqués dans les productions présentées ont été amenés à proposer les consignes à partir desquelles les images ont été générées, à les adapter afin d’obtenir d’autres images et, finalement, à trancher. Les images sont présentées telles quelles, avec leurs imperfections. Il ne s’agit dès lors pas de tromper mais de confronter artistes et spectateurs à une question fondamentale : est-ce notre destin ?
Est-ce le destin que nous désirons ?