Drôle d’endroit pour une cérémonie : c’est dans un recoin de la Cité de la Musique que Bernard Foccroulle a présenté en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire les lauréats HSBC 2014 de l’Académie du Festival d’Aix-en-Provence : la soprano française Chloé Briot (qui –scoop ! – interprètera Yniold dans Pelléas et Mélisande en 2016 au Grand Théâtre de Provence) ; la soprano biélorusse Katharina Melnikova ; le baryton-basse islandais Andri Björn Róbertsson et la basse polonaise Krzysztof Bazyk, pour ce qui concerne le chant.
Laurent Bayle, également présent, a profité de l’occasion pour rappeler qu’une page s’apprêtait à se tourner : dans quelques semaines l’appellation Philharmonie de Paris englobera à la fois le nouveau bâtiment édifié par Jean Nouvel et l’actuel, construit par Christian de Portzamparc vingt ans plus tôt. Par un mauvais concours de circonstance, un incident de circulation avait auparavant ralenti le trafic de l’unique ligne de métro en direction de la Porte de Pantin, rendant légitime la question de l’accessibilité d’un site censé à terme accueillir plusieurs milliers de personnes par soir.
La soirée s’est poursuivie par un concert dirigé par François-Xavier Roth, à la tête de son orchestre Les Siècles. A la Symphonie n°7 de Beethoven, ont succédé en deuxième partie des airs de Mozart interprétés par deux lauréates HSBC des éditions précédentes : Sabine Devieilhe et Andreea Soare. Dire de la première que sa colorature est aujourd’hui une des plus précises et des plus délicates qui soit ne surprendra personne, même si la finesse de l’aigu touche parfois à la transparence. Ces trois arias zebrées de notes allant jusqu’au contre Sol – « Vorrei spiegarvi O Dio », « No, che non sei capace » et « Popolii di Tessaglia… Io non chiedo » – ont enthousiasmé le public, à juste titre.
Le soprano de la seconde possède davantage de matière. Dans l’unique bis de la soirée – « Sull’aria…che soave zeffiretto », le duettino extrait des Nozze di Figaro, elle est la Comtesse quand Sabine Devieilhe chante Suzanna. N’empêche, bien que la voix, belle, homogène et conduite avec un art consommé du legato, n’appelle aucun reproche, ses deux airs – « Ah, lo previdi, Ah, t’invola » et « No, che non sei capace » – nous ont semblé auparavant bien longs. Défaut d’expressivité ? Peut-être. Il faut dire que ces deux pages ne sont pas les plus inspirées que Mozart, si grand compositeur soit-il, ait laissées à la postérité. Dans ces conditions, à l’impossible, nul n’est tenu, pas même une des chanteuses les plus prometteuses du moment.
Lauréats HSBC de l’Académie du Festival d’Aix-en-Provence. Les Siècles, François-Xavier Roth (direction musicale), Sabine Devieilhe, Andreea Soare (sopranos). Paris, Cité de la Musique, mardi 2 décembre 2014, 19h.