Le Festspielhaus de Baden-Baden vient de clôturer son Festival de Pâques avec six productions scéniques en dix jours mais aussi quelques perles ou curiosités, telles cette fête autour du Berliner Philharmoniker qui a permis aux solistes de se mettre en valeur dans une enthousiasmante décontraction (l’une des instrumentistes a d’ailleurs fait tomber le triangle à la fin de sa prestation, emportée par son élan)… Le programme est un rien inattendu et pour le moins éclectique, de Rossini à Vivaldi en passant par Berio. Pour accompagner le tout, un modérateur hilarant, Klaus Wallendorf, ancien cor principal et occasionnel maître de soirée, dont les jeux de mots ont distrait le public au cours des changements de pupitres qu’on aurait aimé pour le coup voir se prolonger. Parmi les plus brillants des solistes, à signaler le violoniste Daishin Kashimoto, magistral de virtuosité dans les Quatre Saisons.
Au cœur de ce spectacle pour le moins original, les Folk Songs de Lucio Berio écrits pour sa femme et ici interprétés par Magdalena Kožená sous la direction de son époux Sir Simon Rattle. Très enceinte et visiblement heureuse de son état, superbe dans une robe violette très moulante, la mezzo a montré que ce répertoire lui allait comme un gant, dans toute la variété imposée par les différentes mélodies. Avec une simplicité aristocratique, elle jongle entre les différentes langues (dont le sarde, le français ou le sicilien) de chansons exigeantes abordées avec autorité, puissance et volupté. Tout à tour gouailleuse à la limite de la vulgarité puis héroïne de tragédie grecque incarnée, la voix expose toute sa souplesse et sa flexibilité dans ces mélodies qu’on souhaiterait entendre plus souvent.
Quant aux cuivres qui concluent un spectacle d’une durée de trois heures où l’on n’a pas vu passer le temps, ils ont prouvé, si besoin était, qu’ils étaient à des années lumière d’une fanfare municipale. Les solistes étaient douze sur scène, référence à la Cène oblige en ce Jeudi Saint. [Catherine Jordy]
La fête musicale du Berliner Philharmoniker
Modération : Klaus Wallendorf
1. Solistes (instruments à vent) du Berliner Philharmoniker
Ouverture du Barbier de Séville, Danse des heures de La Gioconda, Concerto « La notte » de Vivaldi
2. Solistes baroques du Berliner Philharmoniker
Vivaldi, Les Quatre Saisons
3. Mezzo-soprano : Magdalena Kožená sous la direction de Sir Simon Rattle et une formation réduite du Berliner Philharmoniker
Berio, Folk Songs
4. Solistes (cuivres) du Berliner Philharmoniker
Gabrieli, Sonata XV, Pergolesi, Suite pour cuivres, Rossini, « Dunque io son », Le Barbier de Séville, arrangements de Sándor Balogh
Baden-Baden, Festspielhaus, 17 avril 2014.