Le Met condamné par un arbitrage
A la suite de l’agression russe en Ukraine, le 24 février 2022, on se souvient que plusieurs artistes de nationalité russe et en particulier ceux qui n’avaient pas pris position contre la guerre et a fortiori ceux qui la justifiaient, avaient été déprogrammés d’un certain nombre de spectacles, voire démis de leurs fonctions à l’instar de Valery Gergiev à Munich. Il en était allée de même, au moins dans un premier temps, pour Anna Netrebko, à qui l’on a d’abord reproché tout à la fois son silence et sa proximité avec le pouvoir russe. Le Metropolitan Opera de New York avait ainsi annulé sa participation dans plusieurs productions de la saison actuelle et prochaine (Don Carlo, La Force du destin, Andrea Chenier : au total, 13 représentations), sans indemnités.
Le New York Times nous apprend ce 17 mars qu’à la suite d’un arbitrage demandé par les avocats de la soprano et rendu le mois dernier, l’institution new-yorkaise a été condamnée à verser 200 000 dollars en compensation à Anna Netrebko, par application du principe du « pay or play » au terme duquel les opéras doivent payer les artistes même s’ils renoncent ensuite à les engager.
Selon le journal, le Met a eu beau expliquer que son refus de la rémunérer était lié à celui de la soprano de condamner l’invasion de l’Ukraine (ce qu’elle a pourtant fait par la suite, et d’ailleurs l’article du NYT rappelle quant à lui que la décision du Met renvoie plutôt au refus d’Anna Netrebko de condamner le président Poutine), violant ainsi le code de conduite de l’institution, l’arbitre Howard C. Edelman, a sèchement fait valoir qu’Anna Netrebko était « sans nul doute une supportrice de Poutine », mais que c’était son droit et que ça n’était « certainement pas une turpitude morale constitutive d’une mauvaise conduite passible de poursuites », selon des termes repris par le New York Times.
Cependant, toujours selon le quotidien new-yorkais, l’arbitre a également condamné Anna Netrebko à 30 000 dollars d’amende pour avoir tenu des propos « hautement inappropriés » après l’invasion. En cause, un post qu’elle aurait partagé sur les réseaux sociaux et qui, selon le New York Times, trouvait les critiques occidentales « aussi diaboliques que des agresseurs aveugles ». C’est en tout cas l’interprétation que semble en avoir fait l’arbitre, selon le journal.
Dans un entretien cité par le même article, le patron du Met, Peter Gelb, a simplement commenté qu’il assumait ne pas avoir appliqué le principe du « pay or play », considérant qu’il n’était pas « moralement juste » de payer quelque somme que ce fut à la soprano compte tenu de sa proximité avec le président russe, ajoutant que la majorité des spectateurs n’accepterait certainement pas le retour de Netrebko sur la scène du Met.
Yusif Eyvazov licencié
Notons par ailleurs que ce dernier vient également d’annuler la participation du mari de la soprano, Yusif Eyvazov, aux représentations de Tosca, à partir du 30 mars. Il sera remplacé par Matthew Polenzani. Cette décision serait également liée aux critiques émises par le ténor contre la soprano Angel Blue, qui avait accusé Anna Netrebko de « blackface » à l’occasion de représentations d’Aida à Vérone l’été dernier. Une autre raison proviendrait du fait que Tosca sera incarnée par la soprano ukrainienne Liudmyla Monastyrka. Il s’agit là encore de l’interprétation qu’en fait le journaliste du New York dans son long article.
Les comptes entre le Met et le couple star de la scène lyrique n’ont donc pas fini d’être réglés…