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Les 350 ans de l’Opéra de Paris s’ouvrent dans la morosité

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Brève
31 décembre 2018
Les 350 ans de l’Opéra de Paris s’ouvrent dans la morosité

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Il y a quatre ans, à l’occasion du gala du tricentenaire de l’Opéra-comique, notre confrère Christophe Rizoud avait regretté de voir balayé, en deux heures seulement, le répertoire de cette fertile institution. Pour ce gala inaugural des 350 ans, l’Opéra de Paris ne se sera même pas donné cette peine : la soirée se limite aux répertoires du XXe siècle pour le ballet, et du XIXe pour l’opéra. Composé de quelques tubes, mais aussi de quelques raretés relatives, le programme lyrique ne reflète guère le passé de la maison. Parmi les ouvrages choisis, seuls Thaïs et Don Carlos ont effectivement été créés à l’ONP. Si la Damnation de Faust, WertherCarmen, Faust, Manon, Traviata ou Hériodade ont bien eu l’honneur d’y être joués (souvent tardivement), ce n’est même pas le cas des Pêcheurs de perles ou des Cent vierges de l’aimable Lecoq (créé à Bruxelles aux FantaisiesParisiennes ! ). Avec cette opérette, Sonya Yoncheva  offre le seul air un peu léger dans une sélection de morceaux particulièrement peu festifs. Nous n’entendrons donc pas ce soir d’extrait de Pomone, premier ouvrage monté pour l’Académie royale de Musique. Impasse totale sur Lully et Rameau, et ne parlons pas de Mozart en français. Rien de Cherubini, Spontini, Halévy, Meyerbeer, qui firent les belles heures de l’Opéra. Rien non plus pour les XXe ou XXIe siècle (on se serait contenté de photos !) quand l’institution peut s’enorgueillir d’avoir par exemple créé la version en trois actes de Lulu, la version française des Dialogues des Carmélites, ou Saint François d’Assise. Pas un mot non plus des grandes voix qui s’y sont produites.  On se croirait dans l’un de ces concerts que nous entendons régulièrement toute l’année au Théâtre des Champs-Elysées. Réduit à trois chanteurs (le baryton Ludovic Tézier devant jouer les basses pour le trio final de Faust),  le plateau ne peut en aucun cas rivaliser avec les prestigieux galas du Metropolitan Opera. La mise en espace de Vincent Huguet fait également pâle figure en comparaison. Elle offre quelques scènes incongrues (Hymel chantant l’air de La Fleur de Carmen en s’adressant à une maquette de Garnier, le duo de Manon devant un rideau de douche…). Les ballets font penser au jeu des sept erreurs (avec des décors quasiment identiques dans leur vacuité). Un beau moment de poésie vient racheter la soirée avec le trio de Faust où les «  anges purs » sont des tutus descendus des cintres. Vocalement, Bryan Hymel nous aurait presque rassuré sur son état vocal si ce n’était son Werther assez problématique. Ludovic Tézier chante superbement, mais le contexte ne lui permet que difficilement d’exprimer un personnage théâtral. Sonya Yoncheva nous revient en pleine forme et sa présence conduit à l’incandescence le duo de Manon et celui de Traviata. Dan Ettinger fait de son mieux pour essayer de couvrir les chanteurs mais n’y parvient pas toujours. On regrette aussi l’absence de bis.

Côté ballet, le programme se limite à un extrait de la Carmen de Roland Petit (magnifiques Eleonora Abbagnato et Stéphane Bullion), deux extraits du Parc et deux autres de La Dame aux Camélias, c’est dire la variété. Pour le second extrait de cet ouvrage (actuellement à l’affiche…), Eleonora Abbagnato et Stéphane Bullion sont encore une fois exceptionnels. Initialement annoncé, le corps de ballet a disparu de l’affiche. Pas d’apparition surprise (celle de Karl Paquette, qui fait ses adieux, aurait été un beau cadeau au public). Là encore, les extraits offerts sont uniformément moroses, mais au moins appartiennent-ils au répertoire de la maison. On regrette enfin l’absence d’évocation de la période Noureev et de son répertoire autrement flamboyant. 

Le vrai plaisir aura été de réentendre enfin au Palais Garnier les grandes voix pour lequel il a été conçu et non des chanteurs baroques ou mozartiens à la projection insuffisante. Cette fois, la salle se remplit d’un son ample et puissant mais quel mal a donc fait Charles Garnier pour que l’on veuille à tout prix défigurer le bâtiment ? Deux sculptures en forme de pneus dorés dressées en haut du grand escalier, oeuvre de Claude Lévêque commandée pour l’occasion, poursuivent le massacre esthétique initié par la suppression des cloisons des loges en 2015 (voir photo ci-contre). Souhaitons-les éphémères et espérons que le prochain gala des 350 ans, prévu l’année prochaine, nous propose un concept pertinent, et non un simple concert en costumes.

 

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