Tout au long de son extraordinaire carrière, Renata Scotto est morte sur scène un nombre incalculable de fois et a su développer un savoir-faire miraculeux dans l’art de représenter ce moment mystérieux où un personnage passe de vie à trépas. Elle stylisait à l’extrême l’instant même de la mort, par une sorte de sursaut et d’abandon du corps entier, qui signifiait pour le spectateur que la vie avait abandonné le personnage sur scène. Elle aura également éprouvé les manières les plus sophistiquées possibles de tomber au sol, en des chutes lentes et composées (cf. Marguerite, Madama Butterfly et Suor Angelica). Un aigu peut être fatal (cf. Luisa Miller), tandis que les dernières notes chantées dans l’agonie s’expirent peu à peu (cf. Desdemona, Manon Lescaut et Elle). On notera également un goût prononcé pour la mort à l’envers et les yeux écarquillés ou révulsés (cf. l’extraordinaire zoom du cameraman à la fin de l’extrait de La Gioconda) et des excentricités réjouissantes (les talons aiguilles dans Tosca).
Plus que jamais, l’art de Renata Scotto est vivant.