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Deux jours après le week-end pascal, les Musiciens du Louvre Grenoble sont venus en voisins ou même en résidents de la bonne ville de Lyon pour donner dans ce haut lieu du baroque qu’est la chapelle de la Trinité un concert regroupant deux cantates de Bach (composées l’une et l’autre pour le jour de Pâques, en 1707 et en 1715) et la Grande Messe en ut mineur de Mozart. Dès l’ouverture de la Cantate Der Himmel lacht ! Der Himmel jubiliert (« Le ciel rit, la terre jubile ») et son thème de fanfare, le public est entraîné dans l’allégresse par la chaleur et la plasticité du son, dans une exécution musicale réglée au millimètre par Marc Minkowski. La succession des trois airs alternant avec les récitatifs produit un effet d’équilibre parfaitement réussi, occupant pleinement l’espace sonore de la chapelle – le chef tient à exprimer à la fin du concert le plaisir de la formation à jouer dans un lieu aux dimensions moins vastes que les dernières salles où elle s’est produite (notamment à Tokyo et à Kanazawa). La concentration du son, tant des instruments que des voix, est en effet d’une intensité exceptionnelle. La seconde cantate Christ lag in Todesbanden (« Christ gisait dans les liens de la mort ») offre une tonalité plus recueillie, même si tous les versets se terminent par un Alléluia. En deuxième partie, la Grande Messe en ut mineur de Mozart, inachevée au regard de la liturgie, affirme dans l’interprétation qui nous en est donnée un parfait achèvement. La conception du programme permet de mesurer à la fois l’imprégnation du style de Bach dans cette œuvre mais aussi sa dimension quasi opératique, dans les airs (superbe « Laudamus te » soulignant la virtuosité de la composition) comme dans les ensembles où le chœur est constitué des seuls solistes (magnifique Gloria, impressionnant « Qui tollis »), qui sont au nombre de dix. Il émane de ce choix le sentiment d’une grande intimité. Marc Minkowski s’en explique à la fin du concert, rappelant les conditions de création de cette Messe dans les tribunes d’orgue de l’abbaye bénédictine de Salzbourg le 26 octobre 1783, où l’espace restreint ne permettait certainement pas d’accueillir un chœur élargi. [Fabrice Malkani]
Johann Sebastian Bach, Cantates BWV 31 (Der Himmel lacht ! Die Erde jubiliert) et BWV 4 (Christ lag in Todesbanden)
Wolfgang Amadeus Mozart, Grande Messe en ut mineur KV 427
Ditte Andersen, Ana Quintans, sopranos I – Marianne Crebassa, Pauline Sabatier, sopranos II – Carlos Mena, Owen Willetts, altos – Colin Blazer, Jan Petryka, ténors – Charles Dekeyser, Norman Patzke, basses.
Lyon, Chapelle de la Trinité, mercredi 3 avril, 20h00