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Promesses tenues pour la soprano Natacha Figaro et le ténor François Rougier, lauréats du Concours international de chant de Clermont-Ferrand 2012 : ils ont prouvé que le jury ne s’était pas trompé en les couronnant. Nonobstant, consacrer un récital exclusivement à des mélodies et airs d’opéras de Massenet n’était pas sans risques ! Ne doutons pas un instant qu’après avoir assumé et affronté sans démériter les écueils d’un tel programme, ils sauront en tirer les leçons. Natacha Figaro se met vocalement en scène avec un bel appétit et une fière assurance. L’appui sur tout l’ambitus plus que prometteur n’appelle pas d’objection ainsi que le laisse entendre la tenue des aigus dans Soleil couchant. De même qu’elle atteint à une remarquable variété d’expressions dans « Dis-moi que je suis belle » de Thaïs. Elle joue avec souplesse d’une respiration extrêmement mobile et son assise vocale ne perd rien en stabilité jusqu’à surfer avec aisance sur les accents les plus opposés. Une technique vocale exemplairement conduite lui ouvre aussi bien les subtils parfums de Roses d’octobre que les nuances de L’esclave qui semblent se libérer sur un souffle d’une infinie ductilité. La délicate Elégie de même que les frissons symbolistes de Nuit d’Espagne relèvent de la même élégance à exprimer la passion sans surcharge. Alors on lui pardonne une propension à parfois rouler les « r ». De même que l’on aura fait abstraction chez François Rougier d’une tendance à nasaliser faute de trouver la juste résonance qui libère complètement l’aigu. Le redoutable « Ah, fuyez » de Des Grieux a paru un brin surdimensionné aux capacités d’un ténor présumant de son assise vocale. Et ce n’est pas le Werther de « Pourquoi me réveiller ? » qui nous démentira. Rougier peut néanmoins se flatter de posséder un grain des plus captivants. C’est dans le registre plus spontané de L’improvisateur qu’il révèle sa véritable dimension de comédien, ou alors sur l’expressivité plus distanciée de Nouvelle chanson qu’il parvient sans réserve à une juste séduction. Mais lorsque l’on a le privilège d’être littéralement porté par le talent époustouflant d’un Jeff Cohen, il vous est beaucoup pardonné… [Roland Duclos]