Si l’opéra Nixon in China de John Adams a tant marqué lors de sa création en 1987 et de son premier enregistrement l’année suivante, c’est sans aucun doute en raison de l’actualité de son propos : la dimension réaliste, quasi documentaire de l’œuvre avait à juste titre pu frapper l’auditeur, peu habitué à voir évoluer sur scène des personnalités publiques appartenant à la sphère politique et médiatique, ni des événements aussi récents que cette rencontre entre Nixon et Mao, qui avait eu lieu en 1972. Jouer cette œuvre aujourd’hui pose ainsi nombre de questions en termes de dramaturgie et de réception par les spectateurs, pour la plupart trop jeunes pour avoir vécu à l’époque de l’action.
John Fulljames, dont la production créée à Copenhague en mai dernier est présentée par le Scottish Opera à partir du 18 février, apporte des éléments de réponse dans l’interview ci-dessous, où il considère notamment que, cinquante ans après les faits, la visite du président américain en Chine relève de l’Histoire voire, dit-il, du mythe.
Si l’on suit ce raisonnement, regarderons-nous désormais Nixon in China à la manière d’une fiction ? Nixon et Mao seront-ils les prochains Simon Boccanegra et Francesco Foscari, dont l’existence bien réelle sera relue sous le prisme de l’art lyrique ?
D’hommes politiques à héros tragiques il n’y aurait donc qu’un pas, que l’opéra permettrait aisément de franchir.