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Peut-on baptiser lyrique un concert où la musique symphonique tient presque deux fois plus de place que le chant ? Donné à l’Opéra Berlioz de Montpellier vendredi dernier, 14 février, ce concert associait étrangement Les nuits d’été à la Symphonie n°1 de Mahler. Etrangement parce que si rapprocher les deux compositeurs n’a rien d’incongru a priori, les richesses sonores de la Symphonie dite Titan n’étant pas antinomiques avec celles imaginées par l’auteur de la Symphonie dite fantastique, en revanche le cycle des Nuits d’été y est étranger, puisque Berlioz y soumet sa puissance d’orchestrateur à la musicalité de la prosodie de Théophile Gautier. Dès lors, faut-il rappeler l’évidence ? La fluidité de la musique épousant celle du texte, la diction de l’interprète doit couler de source. Ce n’est pas faire injure à Michelle DeYoung que de constater qu’en dépit de sa probité l’effort est encore perceptible dans l’articulation et la couleur approximative de certaines voyelles. Du coup cette grande voix, contrainte de tenir la bride à une ampleur souvent tentée de se déployer, semble gênée aux entournures, et la beauté sonore n’y peut rien. Comment ne pas regretter qu’on ne lui ait pas proposé un autre cycle, dans une langue où elle aurait été davantage à son aise ? A la tête de l’Orchestre national de Montpellier Languedoc-Roussillon, Alexander Joel l’accompagne avec le souci d’être pour la voix un écrin. Manque de répétitions ? Quelques définitions semblent perfectibles aux cordes. Dans la symphonie de Mahler en revanche ce sont les cors – certes très sollicités – qui entachent une exécution globalement brillante, sous une direction d’abord prosaïque, puis emphatique, avant qu’elle ne trouve un allant dynamique satisfaisant jusqu’à l’orgie finale. Un voisin, revenant à l’essentiel – pour lui comme pour nous – s’exclame : « Ah, Crespin peut dormir tranquille ! » [Maurice Salles]