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Opéra de Paris 2025-26 : une saison sans grandes surprises ou presque

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Brève
2 avril 2025

Infos sur l’œuvre

Détails

La nouvelle saison de l’Opéra de Paris offrira 17 titres lyriques dont 7 nouvelles productions. La production de Calixto Bieito du Ring wagnérien continuera son cours, toujours sous la direction de Pablo Heras-Casado, avec Die Walküre en novembre (Stanislas de Barbeyrac, Iain Paterson (qui avait remplacé Ludovic Tézier pour le Rheingold de la présente saison), Günther Groissböck, Elza van den Heever, Tamara Wilson, Eve-Maud Hubeaux) et Siegfried en janvier (Andreas Schager, Iain Paterson, Gerhard Siegel, Brian Mulligan, Mika Kares, Marie-Nicole Lemieux et Tamara Wilson). Ceux qui avaient espéré un retour de Ludovic Tézier seront légitimement déçus. Götterdämmerung sera créé isolément la saison suivante, avant deux séries de Ring complet du 6 au 13 novembre et du 15 au 22 novembre (ouverture de la billetterie pour le Ring le 12 novembre). Aida fera l’objet d’une nouvelle mise en scène, sous la forme d’une reprise du spectacle salzbourgeois de Shirin Neshat (2017, ce qui ne nous rajeunit pas). La précédente production, due à Lotte de Beer, donnée à huis clos en 2021, n’aura donc pas survécu au COVID. On notera en particulier la présence en alternance de Piotr Beczala et Gregory Kunde et, pour certaines représentations, d’Ève-Marie HubeauxEugène Onéguine sera mis en scène par l’acteur et réalisateur britannique Ralf Fiennes qui avait incarné le personnage au cinéma en 1999, et dont ce seront les débuts dans la mise en scène lyrique. L’œuvre sera dirigée par Semyon Bychkov, et le jeune et prometteur Boris Pinkhasovich interprétera le rôle-titre. Satyagraha et son compositeur Philip Glass feront leur entrée au répertoire lyrique de l’Opéra (la musique du compositeur américain a toutefois déjà été entendue à de nombreuses reprises dans des ballets). Il s’agira là encore de la première mise en scène du couple de chorégraphes Bobbi Jene Smith et Or Schraiber. Ercole amante, d’Antonia Bembo (1707) est la vraie surprise de cette programmation. Chanteuse et compositrice vénitienne réfugiée à la cours de Louis XIV pour fuir un mari violent (le Roi-Soleil avait été séduit par sa voix et l’avait prise sous sa protection), Antonia Bembo avait composé son ouvrage sur un livret précédemment utilisé Francesco Cavalli, dont elle était l’élève. Ercole amante n’avait jamais été donné scéniquement et sa mise en scène sera signée Netia Jones. Leonardo García Alarcón dirigera sa formation, la Cappella Mediterranea. L’ouvrage sera donné à Bastille. Enfin, La Finta Giardiniera sera confiée aux solistes de l’Académie de l’Opéra (mise en scène de Julie Delille, direction musicale de Chloé Dufresne).

Les reprises affichent de grands titres du répertoire propres à attirer sans trop de risque un large public, mais dans des distributions qui laissent parfois songeur. Tosca sera donnée 24 fois, avec six combinaisons de casting, et, pour dire les choses gentiment, il ne faudra pas se louper. Parmi les cinq ténors programmés, on signalera, pour les représentations de 2025, les Mario de Roberto Alagna et de Jonas Kaufmann (trois représentations chacun, celles de Kaufmann face au Scarpia de Ludovic Tézier). Sondra Radvanovsky sera Tosca pour la série de 2026. Les Nozze di Figaro seront données 14 fois à Garnier, autant que La Traviata à Bastille (Aida Garafullina, Xabier Anduaga et Roman Burdenko, puis Pretty Yende, René Barbera et Ludovic Tézier). La Bohème transposée dans une station spatiale sera donnée pour 11 représentations. Anna Netrebko fera son retour dans Un Ballo in maschera mais il n’est pas sûr que sa seule présence suffise à illuminer la triste production de Gilbert Deflo. Pour ces 11 représentations, un ténor, deux sopranos et trois barytons chanteront en alternance, avec quatre possibilités de casting, dont deux soirées Netrebko / Tézier. Vue et revue, la production de Carmen de Calixto Bieito (13 représentations) sera la seule à défendre les couleurs de l’opéra français, répertoire dont le patron de l’institution, Alexandre Neef, déclare qu’il ne remplit pas suffisamment (il nous semble pourtant nous souvenir que Le Cid, ouvrage de Massenet moins rebattu que Manon ou Werther, avait largement trouvé son public quand il avait été défendu par Roberto Alagna…). Pas de belcanto romantique tragique cette saison, mais sa version bouffe avec La Cenerentola dirigée par Enrique Mazzola, avec au moins trois chanteurs authentiquement belcantistes dans la distribution (Vasilisa Berzhanskaya, Lawrence Brownlee et Nicola Alaimo). Raphaël Pichon dirigera la reprise d’Ariodante (11 représentations à Garnier), second titre baroque de la programmation. On se félicitera de la reprise de Nixon in China, grand succès en 2023, avec le retour des vétérans Thomas Hampson et Renée Fleming, sous la direction du trop rare Kent Nagano. Etait-il toutefois judicieux de programmer, non seulement la même saison mais à un mois d’intervalle, des ouvrages de John Adams et de Philip Glass, s’agissant de deux compositeurs américains contemporains, ayant certes leur style propre, mais l’un et l’autre influencés par la minimalisme… On notera enfin une reprise de la belle production de Robert Carsen de Rusalka aux tarifs particulièrement doux (moins de la moitié des prix habituels) : on espère que cette initiative convaincra le grand public de découvrir des titres moins courus.

Les finances sont bonnes, et l’année 2024 a été terminée à l’équilibre, avec même un léger excédent de 1,3 million d’euros. Le modèle reste fragile, l’Opéra étant financé par l’État à hauteur de 43%. Interrogé sur les multiples soldes de dernières minutes (-50% sur Don Carlos par exemple) et leur impact sur les abonnements, Alexander Neef s’est voulu rassurant, citant un remplissage à plein tarif de Bastille à hauteur de 2300-2400 places (pour une jauge à 2700) et un taux d’abonnés autour de 30%. Le nombre de jours de grève reste stable entre 8 à 10 jours par an, pour une perte de recettes annuelle d’environ 2,35 à 3 millions d’euros. La recherche d’un directeur musical reste d’actualité mais se heurte à plusieurs contraintes, notamment une bonne entente avec l’orchestre, ce qui implique que le candidat l’ait déjà dirigé. Par ailleurs, la fermeture prochaine des salles, et la réduction d’activité induite, pose la question du rôle de celui-ci. Alexander Neef en a profité pour faire un point sur les travaux programmés dans les deux salles. Leur coût est bien budgété et l’enveloppe globale est de 600 millions d’euros d’ici 2037. Ils incluent la mise au norme des scènes (c’est ce qui entraine la fermeture des salles), le traitement d’air, les réseaux électriques, les toitures… Il n’est en revanche pas prévu de travaux spécifiques pour améliorer l’acoustique de Bastille qu’Alexandre Neef déclare supérieure à celle de Garnier (!). La fermeture de Garnier aura lieu à l’été 2027 et celle de Bastille à l’été 2030. Les deux théâtres ne seront pas fermés en même temps et les deux salles devraient même être ouvertes simultanément pendant quelques mois dans l’entre-deux. L’ONP est en discussion avec des théâtres parisiens pour trouver des lieux de représentations : le Théâtre du Châtelet, le Théâtre des Champs-Élysées et l’Opéra-comique sont envisagés. Le ballet devrait pouvoir faire quelques tournées, mais celles-ci sont généralement déficitaires et leur coût vient s’ajouter à celui des travaux et à la diminution des recettes parisiennes, ce qui ne simplifie pas l’équation.

L’Orchestre de l’Opéra se produira également en concert à l’occasion du Festival de San Sebastián et du Festival Ravel de Saint-Jean-de-Luz (même programme Ravel / Adès dirigé par Thomas Adès), ainsi qu’à la Philharmonie de Paris (Mozart / Bruckner avec Marek Janowski, puis le retour de Philippe Jordan pour le Requiem de Berlioz avec Pene Pati). Enfin, s’il n’est pas prévu de récitals lyriques avec piano contrairement à la saison en cours, le contre-ténor Anthony Roth Costanzo, distribué dans Satyagraha offrira un concert Haendel / Glass sous la baguette de Karen Kamensek.

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