Dans l’« affaire des loges de Garnier », le tribunal administratif saisi en référé par la Société de Protection du Paysage et de l’Esthétique français (SPPEF) et par plusieurs abonnés de l’Opéra national de Paris a rendu son ordonnance le 3 décembre en fin de journée.
Le tribunal administratif constate qu’à rebours de tout ce que la direction de l’Opéra a prétendu depuis le début de l’affaire, les travaux exécutés sur les loges ont été réalisés sans aucune autorisation. Le tribunal indique : « il ne ressort pas des pièces que [les travaux] aient fait l’objet d’une autorisation prévue par les dispositions précitées du Code du Patrimoine, les recommandations faites par la DRAC Ile-de-France dans son courrier du 10 juin 2014 ne pouvant être regardées comme constituant une telle autorisation de travaux ».
Pour l’Opéra de Paris, c’est un désaveu cinglant et pour les requérants, c’est une première victoire car tout le discours abondamment servi aux médias sur un prétendu « accord de principe » et la « concertation avec la DRAC » tombe. La vérité est que la modification des loges a été réalisée en contravention avec les règles du droit.
Toutefois, le tribunal prend acte qu’une autorisation de la DRAC est intervenue le 24 novembre, soit deux jours avant l’audience, et que les travaux engagés sans autorisation avaient été « entièrement exécutés » lorsque le référé a été introduit. En conséquence, saisi pour suspendre en urgence ces travaux, le tribunal administratif n’a pu que rejeter la demande, devenue sans objet. Pour mémoire, le directeur adjoint de la DRAC a reconnu dans Le Parisien que cette autorisation in extremis avait été obtenue par une « procédure inhabituelle ».
L’Opéra de Paris a simplement « pris acte » par communiqué, ce jeudi soir, du rejet du référé sans en préciser les tenants et aboutissants.
De leur côté, les requérants considèrent que ce référé a permis de clarifier une situation juridique jusque-là confuse et que cela ouvre la voie à des procédures sur le fond, l’illégalité des travaux étant désormais un fait certain.
Ainsi, Maître Benoît Jorion a déposé une requête en référé et au fond contre la décision de la DRAC, l’estimant entachée de nombreuses erreurs et irrégularités tant au regard du Code du Patrimoine qu’au regard des procédures normales d’obtention de telles autorisations.
D’autre part, effectuer sans autorisation des travaux sur un monument historique étant un délit pénal, une plainte au pénal contre la direction de l’Opéra de Paris devrait être déposée prochainement.
Plus anecdotiquement, la direction de l’Opéra de Paris a été déboutée de sa demande de retrait du qualificatif de « vandales » dont elle a été affublée par voie de presse : le tribunal administratif a estimé que cette expression relève du « droit à la libre discussion ».
Une « libre discussion » qui ne semble pas près de cesser…