Tous les cinq ans le Verbier Festival & Academy fête un anniversaire, 20ème, 25ème… cette année ce sera le 30ème, avec un grand raout (le 24/07) où seront présents le banc et l’arrière-banc du carnet d’adresses de Martin Engstroem, qui eut l’idée qui semblait alors incongrue de créer un festival d’été consacré au classique dans cette station « au bout de la route » connue jusque là seulement pour son domaine skiable. Aujourd’hui en juillet s’y côtoient des fous de VTT, dûment casqués et genouillés, et des mélomanes, d’allure sage et confortable, voire cossue
Du gratuit aussi
Festival cher ? Certes. Que voulez-vous, c’est la Suisse… Mais où l’offre gratuite est généreuse et alléchante : matin et après-midi, des master classes toutes plus excitantes les unes que les autres. Avec, pour en rester à notre domaine lyrique, Véronique Gens, Lise Davidsen, Renée Fleming, Thomas Hampson (qui fait le show), James Garnon, le chef James Gaffigan et, pour le jeu d’acteur, Timothy Carroll et chaque matin, à 10h30, la répétition générale du grand concert du soir, entrée libre aussi. Sans parler d’une kyrielle d’activités en tout genre, ballades musicales, ateliers pour enfants, karaoké classique et on en passe…
D’abord la jeunesse
Verbier, c’est avant tout un grand bain de musique non stop : trois concerts (au moins) chaque jour et une atmosphère très stimulante, avec deux orchestres de jeunes, dont un de juniors (15-16 ans de moyenne d’âge) aux performances spectaculaires. Cette année ils seront sous la direction de James Gaffigan et on pourra assister à leur travail.
Une bonne partie du budget du festival (considérable grâce au mécénat, particulièrement développé en Suisse) est dédiée à ces activités de formation, avec un système de sélection allant chercher des apprentis-musiciens aux Etats-Unis, en Asie (évidemment) et en Europe et une Academy de violon, piano, violoncelle, musique de chambre. D’où un climat d’enthousiasme et d’émulation assez grisant.
Un peu de name dropping, quand même
A côté de cela, les concerts semblerait presque banals, et pourtant le casting est étonnant. On n’insistera pas ici sur le symphonique et la musique de chambre – et pourtant… Pires, Wang, Goode, Pletnev, Debargue, Ax, Babayan, Bronfman, Malofeev, Seong-Jin Cho, Kavakos, Yo-Yo Ma, Isserlis, Mäkelä, Kanneh-Mason, Tamestit, Fröst, Jansen, Hope, Baráti, Bell, Batiashvili, Lozakovich, les Capuçon (séparément), les Ebène et, côté chefs, Mehta, Shani, Eschenbach, Nagano, Mäkelä (bis), Domingo …
Sans oublier l’ardent Gábor Takács-Nagy, directeur musical de l’Orchestre de chambre du Festival (leur pétulante intégrale des neuf symphonies de Beethoven, enregistrée à Verbier au fil des années, sort ces jours-ci chez DGG).
On se bornera à citer une intégrale des sonates violon-piano de Beethoven par Marc Bouchkov et l’étonnant Mao Fujita.
Des cast de luxe
Et, pour revenir à la voix, un Requiem de Verdi le 17/07 à la distribution alléchante (Davidsen, Matochkina, De Tommaso, Terfel, le chœur de Santa Cecilia, sous la direction de Daniele Gatti), des récitals de Benjamin Bernheim (Brahms, Schumann, Duparc, Chausson), Bryn Terfel (avec Daniil Trifonov !), Renée Fleming (avec Evgeny Kissin !) Et, last but not least, Wozzeck, en version semi-staged le 27/07, avec une distribution étonnante déjà sur le papier : Goerne, Nylund, Charvet, Ventris, Siegel, Dohmen, sous la direction de Lahav Shani.
Présence de l’histoire immédiate
On signalera aussi, parmi diverses conférences et rencontres, celle avec Evgeny Kissin sur le thème de la responsabilité politique des artistes et de l’instrumentalisation politique de la musique. Question délicate à Verbier, où les musiciens russes étaient depuis toujours très présents. On se souvient que, jusqu’en février 2022, le directeur musical en était Valery Gergiev, qui fut prié de démissionner, et remplacé par l’excellent Gianandrea Noseda.
Verbier Festival & Academy, du 13 au 30 juillet 2023
https://www.verbierfestival.com/programme/?