Année Rameau oblige, c’est dans sa ville natale qu’est donné Rameau, maître à danser, un spectacle créé à Caen par William Christie, proposé également les 21 et 22 novembre à la Cité de la musique. Il rassemble deux œuvres en un acte, de la fin de la vie du Dijonnais, qui ont en commun d’être des pièces de circonstance accordant une très large place à la danse. Ecrites dans l’urgence, et empruntant donc beaucoup à des œuvres antérieures, Daphnis et Eglé et La Naissance d’Osiris, respectivement pastorale héroïque et acte de ballet, ne comportent pratiquement pas d’action, ni aucun lien. Cette musique n’a d’autre ambition que de plaire, ce qu’elle réussit fort bien. Le mérite en revient avant tout à Sophie Daneman, qui sait animer la scène, diriger les acteurs et créer ce continuum qui fait tant défaut à chacune des œuvres. Ainsi parvient-elle à les unifier : Daphnis et Eglé, dont l’amitié s’est muée en amour, passeront l’entracte pour réapparaître dans la Naissance d’Osiris – saluant la naissance de Louis XVI – , Eglé attendant l’heureux événement, dont nous serons les témoins. La succession des danses, ravissantes, deviendrait vite fastidieuse n’étaient les chorégraphies abouties de Françoise Deniau. Lumières et costumes s’accordent parfaitement à créer de splendides tableaux bucoliques où l’on retrouve quelque peu Watteau et Fragonard.
L’orchestre, en fond de scène, est dirigé par William Christie, dans une forme exceptionnelle, avec un suivi attentif du chant, des ensembles et des chœurs. Ses couleurs sont un peu estompées par son éloignement, mais les demi-teintes participent aussi au climat généré par les éclairages et les costumes. Les deux principaux chanteurs, Reinoud van Mechelen, ténor, et Elodie Fonnard, soprano, se distinguent par la qualité de leur émission, de leur intelligibilité et leur talent de comédiens. Magali Léger, en Cupidon puis en Pamilie, est charmante, même si la voix demeure petite. Signalons aussi le puissant Jupiter de Pierre Bessière. Les nombreux duos et le trio de Daphnis et Eglé sont ravissants, ainsi que les chœurs de La Naissance de Vénus. Des œuvres secondaires, sans grande consistance, légères, insouciantes malgré l’incontournable orage de chacune d’elles, qui ont ravi les 1600 auditeurs qui avaient eu la chance d’obtenir une place.
Rameau, maître à danser, Dijon, Opéra, Auditorium, 14 novembre 2014, 20 h