Le label Timpani, grand défenseur du répertoire français, a déjà beaucoup œuvré pour Jean Cras (1879-1932), avec une dizaine de disques, dont son opéra Polyphème. Officier de marine comme son contemporain Albert Roussel, le compositeur breton conçut en 1928, « à bord du cuirassé Provence » un admirable cycle de mélodies, La Flûte de Pan, dont un nouvel enregistrement vient de sortir chez Passacaille. Pour cela, le label belge a fait appel à des artistes belges : la soprano Sophie Karthäuser, le flûtiste Matthijs Koene et l’ensemble Oxalys. On a d’abord un peu de mal à suivre le texte, mais cela tient moins à la diction de la chanteuse qu’au style des poèmes d’un certain Lucien Jacques, qui emprunte ses sujets antiquisants à Pierre Louÿs mais qui s’autorise des coquetteries grammaticales venues de Mallarmé (« Au jailli de la source gerboient les longs roseaux… »). L’œuvre est superbe, comparable aux chefs-d’œuvre du répertoire français pour voix et ensemble de chambre, et mériterait d’être mieux connue. Cette dernière remarque qui vaut aussi pour les deux quintettes qui complètent le programme du disque.
Jean Cras. La Flûte de Pan & Quintettes. Sophie Karthäuser, soprano ; Matthijs Koene, flûte de pan ; Jean-Claude Vanden Eynden, piano ; ensemble Oxalys. 1 CD Passacaille 1057, 69’09