L’audace, même très relative, ne paye pas toujours. Croyant bien faire en cette année de centenaire Massenet, Nathalie Manfrino a enregistré un récital consacré au compositeur, disque qui ne lui a pas valu que des admirateurs, notamment parce qu’elle y interprète des rôles conçus pour toutes sortes de voix fort différentes les unes des autres. Mais que diraient les détracteurs de Madame Manfrino en découvrant le programme que propose Rima Tawil sur son disque « Rêve infini » ? Sous la double protection que lui confèrent, dans le livret d’accompagnement, les textes dus à d’aussi éminentes plumes que celles de Frédéric Mitterrand ou d’Ariane Massenet, la chanteuse franco-libanaise aborde des rôles de soprano dramatique, ce qu’elle est sans doute, mais aussi, très curieusement, un numéro de cirque comme la « Sevillana » hérissée de vocalises, tirée de Don César de Bazan et jadis immortalisée par Sumi Jo. En 1991, Madame Tawil avait eu le courage de recréer à Compiègne le rôle d’Amélie dans Gustave III ou le Bal masqué d’Auber. Cette fois, il n’est pas sûr que son audace soit couronnée de succès, puisqu’il est impossible qu’elle ait les moyens vocaux d’affronter tous ces personnages massenétiens et qu’à l’impossible, nul n’est tenu. [LB]
« Rêve Infini – Jules Massenet », Rima Tawil, Donau Philharmonie Wien, dirigée par Manfred Müssauer, enregistrement réalisé en janvier 2012. 1 CD Integral Classic INT221.244 – 72’26