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« Heur point ne perd une bouche baisée, ains refleurit comme rose arrosée », chantent Fenton et Nannetta dans Falstaff, selon une formule empruntée à Boccace. Bouches qui baisent et bouches qui mangent s’étaient donné rendez-vous en ce lundi 8 avril, et Il y avait salle comble, ou plutôt péniche comble, pour le dernier concert donné dans la série « Bouche à bouche ». Après Des mets à la bouche, des maux à la bouche en janvier, puis Bavards et boulimiques en février, Mireille Larroche proposait un spectacle typiquement « pénichard » avec, cette fois, l’Ensemble Clément Janequin, pour un programme associant musique, discours savant (grâce au biologiste Damien Schoëvaërt et au philosophe Dorian Astor) et gastronomie (le chef Vincent Canto préparant pendant la durée du concert la dégustation qui le clôt). A la musique de la Renaissance -Costeley, Janequin, Sermisy) se mêlait celle d’aujourd’hui ou d’hier. Outre quelques Offenbach, on put y savourer la recette du Tournedos Rossini chantée sur l’ouverture du Barbier de Séville. A la Péniche-Opéra, la musique contemporaine sait faire rire, et ce fut bien le cas avec « Le blason de la bouche » de Régis Campo (2002) et une création mondiale, l’hilarant et trop court « Dîner chez Sénéchal » de Claire-Mélanie Sinnhuber. La chanson était brillamment représentée, par « Tout est bon dans le cochon » de Juliette – qu’on avait pu entendre magistralement interprété par Serge Bagdassarian, dans Les Trois Petits Cochons à la Comédie Française – et la célèbre « Confiture » des Frères Jacques, dans une version où la soprano Julia Wischniewski étalait de sensuelles vocalises sur la tartine du quatuor masculin formé par Dominique Visse, Hugues Primard, Vincent Bouchot et Renaud Delaigue, accompagnés au piano par Nicolas Chesneau. Dommage qu’il n’y ait eu qu’un seul service, on aurait bien repris un peu de rab. [Laurent Bury]