Sous ce titre grotesque, mélangeant italien et anglais, Dynamic poursuit la démarche entamée avec « Bellissimo Italian Opera » et « Bellissimo Baroque », sortis en début d’année. Avec ce disque-florilège, la firme s’offre une carte de visite, susceptible d’attirer ceux qui hésiteraient à acquérir les intégrales d’où proviennent ces extraits (certaines, comme Les Pêcheurs de perles ou Le Roi d’Ys, n’existent d’ailleurs qu’en DVD). Il s’agit donc essentiellement de fragments – aux coupures parfois assez abruptes – de lives enregistrés dans des théâtres italiens, La Fenice surtout, mais aussi au festival de Martina Franca, entre autres. Le disque fait également office d’hommage à Massenet, qui occupe la moitié de la durée totale. Les morceaux choisis font la part belle aux airs pour soprano et pour ténor, non sans inclure quelques scènes d’ensemble, et une pièce orchestrale, l’inévitable Méditation de Thaïs. Et on remarquera le Lied d’Ossian de Werther chanté en italien par Luca Grassi, sans être plus convaincu que d’habitude par cette version pour baryton .
Pour des raisons chronologiques, et surtout pour mettre en avant l’interprète la plus connue, le programme s’ouvre avec Montserrat Caballé dans l’air d’Hypermnestre. En 1983, la diva catalane était encore dans un état vocal présentable, mais sa diction était déjà des plus pâteuses, et l’on ne saisit pas grand-chose du texte. Desirée Rancatore est une belle Marguerite de Valois, qui donne envie d’entendre la suite de son rôle, « O beau pays de la Touraine » étant coupé avant l’entrée en scène des suivantes de la reine, ce qui nous prive de la deuxième partie de l’air, la plus virtuose. Ana María Sánchez prête à l’héroïne du Roi de Lahore une voix et un style assez adéquats par rapport aux exigences du jeune Massenet, et avec une articulation au moins aussi intelligible que celle de Joan Sutherland dans l’unique intégrale existant jusque-là de cet opéra. Evidemment, Annick Massis a sur ses collègues ici réunies l’avantage d’un français naturel et clair ; dans Les Pêcheurs de perles, sa voix présente des qualités et des proportions idéales pour ce répertoire.
Chez Jeon-Won Lee, ce n’est pas tant l’accent exotique qui gêne dans l’air de La Reine de Saba, mais l’extrême mollesse du chant, pour ce personnage d’architecte qui s’indigne des conditions de travail qu’on lui offre et qui sollicite l’inspiration divine. Les moyens vocaux sont là, mais l’interprète semble indifférent, comme absent. Dans Roma, Warren Mok retient bien davantage l’attention, même si le timbre est peut-être intrinsèquement moins agréable. Dernier de ce trio de ténors asiatiques, Jasu Nakajima en Nadir s’aventure en terres beaucoup plus familières et doit rivaliser avec nombre de titulaires fameux : son phrasé est tout à fait correct, mais la voix est assez quelconque, et a tendance à détimbrer dans le grave (et il se dispense de l’ultime « Charmant souvenir », certes apocryphe, mais tellement entré dans la tradition). Giorgio Casciarri fait forte impression en Polyeucte, et l’on se réjouit que l’air retenu ne soit pas le célébrissime « Source délicieuse », mais la majestueuse invocation du héros après son baptême, où à sa voix se joignent celle de Néarque et du chœur.
Le finale de Chérubin, tiré d’un DVD charmant, ne produit pas à l’écoute seule une impression aussi favorable : le texte est incompréhensible, à cause de la diction déficiente des deux chanteuses (Michelle Breedt et Carmela Remigio) et aussi beaucoup à cause d’une prise de son exécrable, qui noie les voix au milieu d’un curieux halo sonore. La dernière scène du Roi d’Ys se distingue par l’excellent français de ses interprètes, tous francophones à l’exception de Giuseppina Punti, dont la Margared un peu pâteuse contraste avec la Rozenn élégante de la Canadienne Guylaine Girard.