La vie et l’œuvre de Giovanni Gabrieli sont indissociables de Venise et de San Marco. La polychoralité fastueuse qu’il y développa aura marqué ses contemporains, ses élèves et successeurs, et demeure encore synonyme de grandeur, d’éclat et de brillant. C’est une pratique maintenant familière que d’organiser un programme musical centré sur Gabrieli selon le calendrier liturgique d’une grande fête vénitienne. Jean Tubéry, auquel on doit cette réalisation, y souscrit en choisissant la fête de la très Sainte-Trinité. Ainsi introduit-il les œuvres inhérentes à cette liturgie par le monumental et bien connu in ecclesiis . La pièce est riche de sortes de couplets – soli, duos, quatuors, symphonies, tutti choraux et instrumentaux – propres à illustrer de façon vivante et contrastée le caractère grandiose et intime du cadre et de la cérémonie. La fermeté et la souplesse de la direction ne permettent pas de dissimuler la relative maigreur des effectifs instrumentaux engagés (dont deux trombones et trois cornets, alors que les témoins font état de dix sacqueboutes et de quatre cornets, sans étendre la comparaison aux autres participants). La spatialisation, puisque trois groupes distincts participent à l’exécution, est difficile à percevoir : « difficile de distinguer l’écho des sons », aurait dit Yvan Audouard. C’est très propre, clair, mais l’énergie, la puissance attendues font défaut. Le parti-pris d’inscrire Gabrieli dans la filiation de Palestrina peut paraître cohérente, malgré l’antagonisme avec Rome et l’orgueil vénitien. Le motet suivant « Benedicamus es Domino », comme le « Confitebor tibi Domine » à trois choeurs, particulièrement soignés, retenus, atteignent une réelle beauté. La dynamique est cependant amoindrie par cette volonté de souplesse constante. La joie du « Jubilate Deo » manque d’éclat. Les qualités du Chœur de Chambre de Namur ni des solistes ne sont en cause. « Domine Deus noster », souple, limpide, renvoie à la polyphonie renaissante plus qu’il ne regarde vers Schütz et Monteverdi. Ecrit pour le jour de l’Ascension, le monumental « Omnes gentes » (psaume 46), à 16 voix, qui conclut le premier volume des Sacrae Symphoniae, achève ce programme intéressant, dont l’éclat et le mordant sont trop souvent absents. Des canzone de Giovanni, aux vents, et de son oncle, Andrea, à l’orgue, permettent des plages renouvelées, dans une cohérence tonale parfaite, comme un motet de Palestrina agrémenté de diminutions par Bassano. Pourquoi n’avoir pas envisagé le plain-chant (grégorien ou ambrosien) pour mieux marquer la relation contrastée aux fastes de la polychoralité ? La virtuosité des instrumentistes de La Fenice est bien connue. Leur cohésion, leur harmonie sont manifestes. Tout juste nous manque-t-il la dimension spatiale festive, grandiose. Il est permis de préférer Paul McCreesh et ses Gabrieli Consort and Players à cette réédition.
Gabrieli / In festo sanctissimae trinitatis
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Infos sur l’œuvre
Détails
Giovanni Gabrieli
In ecclesiis a 14
Canzona seconda a 6
Benedictus es Dominus a 8
Toccata ottava (organo da chiesa) [Andrea Gabrieli]
Confitebor tibi Domine a 13 (in tre cori)
Ricercar quinto tono (organo da chiesa) [Andrea Gabrieli]
Benedicta sit sancta trinitas [Motet de Palestrina, avec les diminutions de Bassano, 1585]
Canzon decimasettima a 12 (in tre cori)
Jubilate Deo a 10
Canzon settima a 7
Domine Dominus noster a 8 (in due cori)
Canzon per sonar primi toni a 8 (in due cori)
Dulcis Jesu patris imago – Sonata con voce a 20
Canzon seconda (a due organi di legno)
Omnes gentes a 16 (in quattro cori)
Solistes
Rosa Dominguez, Eric Mentzel, Hans Jörg Mammel, Stephan Van Dyck, Danièle Bodson, Els Janssens, Thibaut Lenaerts, Etienne Debaisieux
Chœur de chambre de Namur
La Fenice
Direction musicale
Jean Tubéry
CD Ricercar, RIC 129, de 73′ 35, enregistré en juillet 1998 à l’église Saint-Apollinaire de Bolland (Belgique)
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Giovanni Gabrieli
In ecclesiis a 14
Canzona seconda a 6
Benedictus es Dominus a 8
Toccata ottava (organo da chiesa) [Andrea Gabrieli]
Confitebor tibi Domine a 13 (in tre cori)
Ricercar quinto tono (organo da chiesa) [Andrea Gabrieli]
Benedicta sit sancta trinitas [Motet de Palestrina, avec les diminutions de Bassano, 1585]
Canzon decimasettima a 12 (in tre cori)
Jubilate Deo a 10
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Domine Dominus noster a 8 (in due cori)
Canzon per sonar primi toni a 8 (in due cori)
Dulcis Jesu patris imago – Sonata con voce a 20
Canzon seconda (a due organi di legno)
Omnes gentes a 16 (in quattro cori)
Solistes
Rosa Dominguez, Eric Mentzel, Hans Jörg Mammel, Stephan Van Dyck, Danièle Bodson, Els Janssens, Thibaut Lenaerts, Etienne Debaisieux
Chœur de chambre de Namur
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