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Giuditta

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CD
13 novembre 2016
Derniers reflets d’un paradis perdu

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Comédie musicale en cinq tableaux

LIvret de Paul Kneppler et Fritz Löhner-Beda

Créée à Vienne (Staatsoper) le 20 janvier 1934

Détails

Giuditta

Christiane Libor

Anita

Laura Scherwitzl

Octavio

Nikolai Schukoff

Pierrino

Ralf Simon

Sebastiano

Mauro Peter

Premier chanteur de rue (rôle parlé)

Mauro Peter

Le commandant (rôle parlé)

Mauro Peter

Le serveur (rôle parlé)

Mauro Peter

Le second chanteur de rue (rôle parlé)

Christian Eberl

Antonio (rôle parlé)

Christian Eberl

Manuele Biffi

Rupert Bergmann

Le professeur Martini

Rupert Bergmann

Lord Barrymore

Frank Manhold

Le Duc

Frank Manhold

Choeur de la radio Bavaroise

Orchestre de la radio de Munich

Direction musicale

Ulf Schirmer

Enregistré live à Munich (Prinzregententheater) les 21 et 22 janvier 2012

2 CD CPO 777 749-2, 142′

Il faut remonter à 2003 pour retrouver la parution d’un enregistrement intégral de Giuditta, et encore ! La production du Seefestspiele de Mörbisch est certes sympathique, mais bien provinciale, et pour tout dire assez facilement oubliable. Cela nous renvoie à l’enregistrement réalisé en 1983 par Willi Boskowsky pour EMI, d’un tout autre niveau.

On attendait donc avec gourmandise la dernière publication de CPO, confiée à Ulf Schirmer et à ses troupes munichoises. Cet enregistrement s’insère dans une démarche bien plus globale de réhabilitation, par ce label, des opérettes en langue allemande et l’a vu publier un nombre appréciable de titres, la plupart du temps tombés dans l’oubli, de Lehár, Millöcker, Fall, Strauss et quelques autres.

Giuditta occupe une place à part dans l’oeuvre copieuse de Lehár : il s’agit en effet de son opus ultime, qui vit le maître incontesté de l’opérette, la soixantaine bien entamée, atteindre une forme de consécration. La création de Giuditta le 20 janvier 1934, eut en effet lieu, honneur suprême, au vénérable Staatsoper de Vienne, temple de la musique sérieuse. Et pas en catimini ! La soirée fut retransmise sur toutes les radios et fut précédée d’une réclame qui n’a rien à envier aux dernières sorties kaufmanniennes ou alagnesques, et en alignant dans la distribution l’incontournable Richard Tauber et Jarmila Novotna (pas moins), on se donnait les moyens de créer ce qui ne s’appelait pas encore du buzz.

Autant dire que les attentes du public et de la critique étaient énormes. Le succès fut au rendez-vous, assurément, mais peut être pas autant que ce qui était escompté. Les raisons ? Une difficulté du compositeur à se renouveler et à renouer avec la perfection de La Veuve Joyeuse, sans doute. De manière plus diffuse et souterraine, peut être y avait-il aussi une influence du contexte politique : en 1905, l’empire austro-hongrois pouvait encore croire qu’il avait l’éternité devant lui, et s’amuser dans l’insouciance. C’était autrement plus difficile en 1934 : l’empire avait sombré, emporté par la première guerre mondiale. Un an avant, Hitler avait pris le pouvoir à Berlin et il ne fallait pas être grand clerc pour deviner que l’avenir de l’Europe s’assombrissait à vue d’oeil. Car c’est aussi cela que l’on devine dans Giuditta, opérette qui ne se conclut pas sur un happy end, mais au contraire sur une note très amère et brutale. Giuditta, dernier éclat d’un astre déjà mort ? C’est possible.

Lehár avait pourtant cherché à mettre toutes les chances de son côté: un métier éprouvé, une certaine perméabilité à l’air du temps: on s’amusera ainsi à déceler ici ou là dans le livret, à travers notamment la figure de la chanteuse de cabaret, des allusions à Marocco et l’Ange bleu, deux films de Josef von Sternberg sortis en 1930, et marqués par les prestations de Marlène Dietrich.

Le présent enregistrement rend pleinement justice à l’oeuvre. Le mérite en revient d’abord au chef Ulf Schirmer, familier de ce répertoire. Il sait tout à la fois valoriser dans sa luxuriance l’écriture orchestrale particulièrement soignée du compositeur, en s’appuyant pour cela sur les forces très professionnelles de la radio de Munich, idéalement valorisées par la prise de son. On lui sait gré de ne jamais tomber dans la facilité, s’agissant d’une partition qui comporte son lot de pages exotiques de circonstance. Le chef sait aussi insuffler en permanence de la vie dramatique et du mouvement à l’oeuvre. Le fait qu’il s’agisse d’une prise live y contribue certainement.

Sans rivaliser avec le casting all stars de l’enregistrement Boskowsky, la distribution réunie ici est, dans sa globalité, d’un niveau plus qu’honorable. On placera sans hésiter en tête l’Octavio de Nikolai Schukoff, bien connu du public parisien. Voix sombre, timbre héroïque (il chante Max, Florestan, Siegmund et quelques autres rôles peu réputés pour leur légèreté), il ne cherche pas à ranimer le souvenir de Richard Tauber, mais convainc totalement par ses mâles accents dans son incarnation de l’officier balloté par les vicissitudes de la vie militaire. Le rôle, particulièrement fourni (pas moins de 3 airs et autant de duos), lui permet d’exposer les différentes facettes de son talent et le montre autant à l’aise dans l’élégie que dans la fougue amoureuse. Une nouvelle preuve que l’on peut convaincre dans l’opérette sans forcément verser dans la suavité doucereuse…

A ses côtés, Christiane Libor, sans se situer au même niveau, aborde le rôle titre avec probité, et y déploie des moyens avenants de soprano lyrique, au timbre agréablement fruité et à l’aigu radieux. Elle ne fait toutefois pas oublier Anneliese Rothenberger, Hilde Güden ou Lucia Popp… Ce qui manque ici, c’est surtout la distinction, et cette touche d’abandon qui fait par exemple défaut au célèbre « Meine Lippen, sie küssen so heiß ».

Le couple ancillaire formé par Laura Scherwitzl en Anita et Ralf Simon en Pierrino, voix légères de circonstance, s’écoute sans déplaisir, même si la soprano se trouve audiblement en difficulté dans les vocalises stratosphériques de « Komm, komm, wir wollen fort von hier ».

Le professeur Martini est campé avec verve et truculence par Rupert Bergmann. La gouaille irrésistible qu’il met dans l’air « Ja, die Liebe ist so wie ein Schaukelbrett » n’est pas sans rappeler par moments Walter Berry ou Gottolob Frick dans le même répertoire, ce qui n’est pas peu dire.

On sent en définitive l’ensemble des interprètes désireux de rendre justice à l’oeuvre (donnée ici dans son absolue intégralité), dans sa superficialité immédiate comme dans ses zones d’ombre bien réelles. Ce n’est sans doute pas un hasard si, à plusieurs moments, on devine, planant sur l’oeuvre, le spectre de la Ville Morte de Korngold. Le prénom Marietta, dont l’héroïne se retrouve temporairement affublée, certaines tournures orchestrales, la chanson qui revient de manière obsédante aux moments cruciaux de l’intrigue… Il y a là sans doute plus que du hasard. Giuditta, dernier reflet d’un paradis définitivement perdu ? Sans doute, et cet enregistrement parvient à le restituer de manière très fidèle.

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Créée à Vienne (Staatsoper) le 20 janvier 1934

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Giuditta

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Anita

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Octavio

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Premier chanteur de rue (rôle parlé)

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Le commandant (rôle parlé)

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