L’Auferstehung-Historie (Histoire de la Résurrection) s’inscrit dans la longue tradition allemande des XVIe et XVIIe siècles des histoires sacrées. Elle reprend le modèle de Scandello, l’un des prédécesseurs de Schütz à la Cour de Dresde, mais celui-ci innove par l’adjonction constante de la basse continue. Un assemblage des textes des quatre évangiles ayant trait à la résurrection est encadré par une annonce introductive et suivie d’un verset de Paul. Le chœur d’ouverture relève de la tradition polyphonique germanique, alors que la conclusion, festive, marquée par les « Victoria » est confiée au double chœur (traité de façon homophone) et à l’évangéliste. La portée spirituelle est la première dimension de cette œuvre dont la narration n’est que le support. C’est à un authentique récit de la résurrection que nous convie Benoît Haller, évangéliste proprement inspiré et émouvant. Comme dans les Passions, plus tardives, la récitation est proche du plain-chant dont elle adopte la modalité et la souplesse. Son caractère descriptif, imagé, les figuralismes, l’harmonie, tout concourt à l’expression dramatique et à la méditation. Les solistes ponctuent la narration, seuls ou associés par deux ou trois. Il est vrai que Schütz a prévu que chaque personnage soit chanté par deux voix, l’une d’elles pouvant être supprimée ou remplacée par un instrument. Les dix solistes-choristes de la Chapelle Rhénane, rompus à l’exercice s’y montrent sous leur meilleur jour. Les formations vocales et instrumentales réduites auxquelles fait appel Benoît Haller sont conformes aux attentes du compositeur – on est en pleine guerre de Trente ans – et sont idéalement équilibrées. Lumière et ombre se conjuguent, tout comme le doute et la foi. Avec humilité, sans maniérisme, mais avec délicatesse comme avec force, voilà une interprétation marquante qui renouvelle opportunément la discographie.
Etrangement, le Musikalische Exequien, par les mêmes interprètes, nous laisse moins enthousiaste. La beauté des voix est indéniable, tout comme celle des instruments. Toujours le discours avance, la plénitude est constante. La prise de son privilégie par trop le continuo, si beau soit-il. Autant que la violence surexpressive de Gardiner en son temps, le parti pris de retenue, de résignation dérange. Les oppositions, les contrastes semblent amoindris, dans les passages à double-chœur tout particulièrement, la vigueur contenue. Les progressions sont conduites avec une grande intelligence du texte. Mais celui-ci et les figuralismes qu’il génère appellent davantage d’expression, croyons-nous. Le Cantique de Siméon, qui conclut, se signale par sa sérénité confiante.
A signaler le riche livret, où les œuvres sont présentées avec clarté, avec les textes chantés et leurs traductions française et anglaise.