Le caractère indissociable des deux est tel que, de Salieri (Prima la musica e poi le parole) à Strauss (Capriccio), on en débattra longtemps encore. Même si l’ouvrage qui retient notre attention n’y participe d’aucune manière, son objet étant purement didactique, il rappelle fort justement que « c’est le texte qui était là d’abord (sauf rares exceptions) ; c’est lui que le compositeur a choisi et c’est lui (…) qui a inspiré, voire engendré la musique. Le texte est le message, La musique, la voix, la technique sont à son service. » (p. 97).
Marie-Paule Hallard, chanteuse classique et professeur de chant, s’est passionnée et spécialisée dans l’enseignement du chant français en Allemagne. Clarifier et transmettre à des étudiants étrangers les règles qui font la beauté de notre langue a été sa préoccupation initiale. Au fil des ans et des rencontres, le projet s’est structuré pour aboutir à cette publication. Elle ne devrait pas laisser indifférents tous ceux qui sont en charge de la langue et de sa transmission. Clair, riche et concis, le livre s’adresse en priorité aux chanteurs, maîtres et étudiants, mais aussi à tous ceux dont la voix est le truchement, comédiens, orateurs, professeurs, sans oublier les passionnés de chant lyrique.
Qu’il s’agisse d’émission, de liaisons, des hiatus ou césures, d’accentuation, d’articulation, c’est une mine. La première vertu d’un ouvrage d’enseignement n’est pas de faire rêver. Aussi, le lecteur ne devra pas se laisser rebuter par les cinquante premières pages, essentielles, consacrées à la phonétique du français soutenu, correspondant au niveau de langage requis par les textes mis en musique « classique ». Par nature, la lecture des tableaux explicatifs, est rébarbative, faisant appel au vocabulaire consacré. Mais l’énumération ordonnée en fait un outil de référence.
Suivent trois chapitres, où le mélomane trouvera son miel, centrés sur l’analyse de la prosodie française et de sa traduction musicale. Ils sont consacrés respectivement à la diction, à l’articulation et à l’interprétation. Chacun abonde en conseils judicieux, assortis d’exemples pertinents. Seule réserve, quelque peu dérisoire : semblant minorer l’importance du texte des mélodies de la lyrique médiévale et renaissante, l’auteur préconise une prononciation modernisée pour des raisons d’intelligibilité. Le sujet invite au débat, et Marc Mauillon ne nous démentira pas.
Les références, dans le texte, et dans la bibliographie finale, sont autant d’invitations à approfondir la réflexion. Deux index, des personnes et des œuvres citées, complètent utilement ce précieux ouvrage, pragmatique, qui répond à la plupart des questions que peuvent se poser les interprètes comme les amateurs. Véritable manuel, ou traité, il satisfait un réel besoin et mérite d’être connu du plus grand nombre.