Le titre promet et interroge. Le sujet, original, justifie le plus large regard sur les témoignages de tous ceux qui, ne serait-ce que de façon marginale, ont évoqué la musique, sa nature et ses fins. Musicienne, universitaire dont les recherches sont consacrées à la relation de la musique aux savoirs, Florence Malhomme nous livre sa dernière contribution.
Que faut-il entendre par « juste milieu » ? L’équilibre, le sens de la mesure, la modération, la médiocrité ? C’est naturellement vers les sources grecques et latines, qui nourrissent la pensée humaniste, que se tourne l’auteur. De musique il ne sera question qu’à travers les écrits des philosophes, moralistes et théoriciens depuis l’antiquité. Les notions d’équilibre, de justesse et d’harmonie – prises dans leur sens le plus large – nourrissent un dialogue entre musique, rhétorique et éthique. La danse et l’art équestre – essentiel à la formation des élites du temps – sont ainsi abordés. Remarquablement documenté, érudit, l’ouvrage nous laisse quelque peu sur notre faim. On a l’impression d’un riche discours, totalement étranger à la composition et à la pratique musicales, même si – de façon très marginale – la voix, l’ornement, le chant, le récitatif sont évoqués. Philosophes, écrivains, poètes, dramaturges ont voix au chapitre, alors que les théoriciens de la musique sont réduits à la portion congrue, de Jérôme de Moravie à Descartes et Sébastien de Brossard, avec Jean des Murs, Zarlino et Mersenne (seuls cités). Musica speculativa bien davantage que musica practica.
Quant à la déclinaison des principes défendus, elle demeure ici lettre morte. Certes après l’humanisme, le classicisme prévaut chez nous. Cependant la vague baroque qui va submerger l’Europe (et même l’Amérique latine) va largement contredire les affirmations ou spéculations de tous les philosophes, écrivains et théoriciens cités. Le Moyen-Âge est bien mort, et le fossé entre le discours sur la musique et sa pratique n’aura jamais été aussi profond. Si la contribution participe à lever une partie du voile sur un sujet original et prometteur, le musicien ou mélomane non averti qui se sera laissé tenter par le titre risque fort d’en sortir bredouille, s’il va au terme des 510 p..