Encore peu connu du grand public, le jeune baryton allemand Samuel Hasselhorn a cependant déjà acquis un solide bagage. Enfant blond de Göttingen, né en 1990, il a étudié aux conservatoires de Hanovre et de Paris, et s’est ensuite perfectionné auprès de Patricia McCaffrey à New York. Il s’est distingué lors de nombreuses compétitions, en remportant le Premier Prix au concours SWR Junge Opernstars 2018 et au Das Lied International Song Competition, et des prix au Wigmore Hall Song Competition, le Hugo Wolf Competition, les Young Concert Artists Auditions à New York, le Concours international Nadia et Lili Boulanger à Paris et le Bundeswettbewerb Gesang à Berlin, et a finalement remporté le premier prix du Concours Reine Elisabeth à Bruxelles en 2018. C’est précisément lors de ce concours qu’il fit la rencontre de Joseph Middleton, un des pianistes officiels associés à cette épreuve. Middleton, que ses plus fervents admirateurs n’hésitent pas à présenter comme le successeur de Gerald Moore, jouit déjà d’une belle réputation d’accompagnateur, et côtoie régulièrement quelques grandes pointures du Lied. Les deux jeunes gens développèrent ensuite une solide complicité musicale, dont le présent disque est le témoignage.
Hasselhorn, qui par ailleurs poursuit sa carrière dans la troupe du Wiener Staatsoper, avait consacré son premier CD au Dichterliebe (avec le pianiste Boris Kusnezow) ; il revient à Schumann pour ce deuxième enregistrement, présentant cette fois des opus un peu moins courus – on ne peut que s’en réjouir – et datant tous de la très riche année 1840.
Conçu comme un récital, avec une grande diversité d’atmosphères au sein d’une très grande unité de style, le programme permet aux artistes de déployer une très riche palette de couleurs, de magnifiques transparences dans les nuances piano, et une belle ardeur juvénile dans les textes teintés d’héroïsme. Le sens poétique domine de bout en bout, au point qu’on souhaiterait parfois un peu plus de silence entre les plages pour laisser reposer le propos.
Sa vision du Lied, à la fois naturelle et cultivée, engagée mais sans affectation, Hasselhorn la porte spontanément vers l’introspection et la narration. La voix est naturellement timbrée, chaude et pleine de couleurs, et la diction allemande est parfaite. Mais la qualité de l’accompagnement n’est pas en reste ; ce sont deux individualités qui s’expriment et se répondent, les deux musiciens respirent ensemble, en parfaite symbiose : Middleton établit des atmosphères d’une grande poésie, sur lesquelles le chanteur vient très naturellement poser son texte, avec pudeur et retenue, presque sans effort apparent, et dégage dans les très beaux postludes que Schumann réserve au pianiste, un sens aigu de l’à propos. Dans ce beau travail de musique de chambre, la poésie et la justesse de ton sont sans cesse au rendez-vous.