Le plus jeune des fils de Bach n’avait que quinze ans quand son père mourut. Il fut recueilli et formé par ses frères aînés, puis s’en fut courir le monde pour exercer ses talents de claveciniste et de compositeur. Après qu’il eut quitté l’Allemagne du Nord, on le retrouve à Milan auprès du Padre Martini, où il s’initie à l’opéra, genre encore totalement inusité dans la famille Bach, et où il se convertit au catholicisme, autre originalité ! Sa renommée l’amène à Londres, où il restera près de vingt ans, exerçant ses talents à la cour de Georges III et pour le King’s Theater. Composé et créé en 1763, Zanaïda fut longtemps considéré comme une œuvre perdue, avant que le manuscrit ne reparût dans les mains d’un collectionneur américain. Le présent enregistrement lui a redonné vie, après des représentations en Allemagne et en France qui rencontrèrent un grand succès. Le livret, dû à Botarelli d’après Métastase, est une sorte de turquerie mêlant l’intrigue politique, le drame de la jalousie et de sombres complots, avec un happy end qui voit l’héroïne couronnée reine de Perse !
L’écriture vocale extrêmement classique de Johann Christian Bach, relativement peu virtuose pour l’époque, paraît bien convenue à nos oreilles modernes. Faite de courts airs alternant avec des récits assez sommaires, la partition laisse peu de place à l’épanchement des sentiments dont le livret regorge pourtant, et mène à vive allure le récit complexe de l’intrigue. Ce type d’écriture vif et léger constitue pourtant une étape indispensable dans le cheminement de l’histoire de l’opéra, conduisant directement à Mozart, qui, on le sait, admirait beaucoup le Bach de Londres. Les airs, néanmoins, se suivent et se ressemblent, sans variété ni réelle force dramatique, de sorte que l’ennui guette ! Les qualités de l’œuvre sont plutôt à chercher du côté de la richesse instrumentale et de la densité du propos musical, qui témoignent du métier du compositeur.
L’enregistrement présente une distribution assez homogène et de qualité, mais dont aucun chanteur de ressort réellement. Les six sopranos apportent peu de diversité de timbre, et le chef a beau chercher contraste et relief dans la partie instrumentale de la partition, il ne parvient pas tout à fait à créer l’illusion théâtrale. L’enregistrement est néanmoins de bonne tenue générale, et le livret qui l’accompagne, largement dû à la plume de Marc Vignal, est fort bien documenté.