Voici un de ces nombreux CD nés du confinement, lequel nous en a offert au fond beaucoup de superbes. Celui-ci ne fait pas exception, si l’on apprécie l’intimité du duo voix piano au service de la mélodie française. Ainsi Jean-François Novelli a eu l’idée de cet enregistrement de mélodies du XIXe siècle tournées vers le passé en lisant l’essai de Wanda Landowska sur la musique ancienne. Souhaitant aussi rendre un culte au passé, le ténor a effectué un impressionnant travail quasi archéologique dont le CD est l’heureux résultat.
De compositeurs oubliés (Raoul Laparra, Eugène Sauzay, Louis Pitte, Arthur Metzner) en compositeurs toujours applaudis (Reynaldo Hahn, Camille Saint-Saëns, Maurice Ravel, Charles Gounod…), le voyage qui nous est proposé ne manque pas de saveur. Le chant clair, subtil, articulé du chanteur cisèle comme autant de joyaux les textes de grands poètes français, tels Charles d’Orléans, Clément Marot, sans oublier du Bellay, du Baïf et Ronsard (trois étoiles de la constellation Pléiade). On se réjouit aussi que le ténor, magnifiquement accompagné sur un piano Erard par Maude Gratton, ressuscite grâce à son intéressante proposition les vers de Leconte de Lisle, La Fontaine, Verlaine et même un Hymne à Apollon (découvert lors de fouilles sur une des assises de marbre du trésor des Athéniens à Delphes) sur une musique de Gabriel Fauré.
Cependant ce culte pour l’Antiquité, le Moyen-Âge, la Renaissance ou le Parnasse revivifié par les compositeurs du XIXe siècle n’a pas empêché Jean-François Novelli d’y mêler son temps. Il a ainsi commandé à ses contemporains, la chanteuse Juliette, Xavier Béraud ou le pianiste Edouard Ferlet, leurs propres mélodies. Ces pastiches fort réussis font résonner plus encore les mots qu’il ne manque de rappeler d’Alain-Fournier (extraits du Grand Meaulnes) sur le « vent (qui) lui port(e) le son d’une musique perdue ». C’est dire la puissance du rêve.