Infuser à un public élargi le goût de la mélodie et du lied. Former des duos chanteurs-pianistes à ce répertoire. L’Académie Orsay-Royaumont poursuit sa double mission pédagogique. Après Le promenoir des amants en 2019 et Carte postale en 2021, Ombres chimériques, un nouvel album enregistré live début 2022, présente les quatre duos – chanteur, pianiste – lauréats de la troisième promotion.
Gravée sur CD, l’entreprise demeure irrégulière. Programme métissé, de Fauré à Ullmann en passant par Viardot, Debussy et Mahler. Tessiture et personnalités contrastées : deux mezzo-sopranos – Florence Losseau et Anne-Lise Polchlopek – ; deux barytons – Gregory Feldmann et Liviu Holender – ; et leur pianiste – respectivement Eleonora Pertz, Nicolas Royez, Nathaniel Lanasa, Juliette Journaux.
L’écoute a tôt fait de s’apparenter à un banc d’essai dont les conclusions restent influencées par un certain nombre de paramètres personnels qui ne sauraient mettre en cause la valeur de chacun des binômes présentés. L’attrait immédiat, par exemple, du timbre de Liviu Holender, mâle, dense, riche comme la terre fertile sur laquelle poussent les épicéas en Forêt noire. Comme le disait la grande Duchesse de Gerolstein à propos des militaires, c’est beau un beau baryton. Martelés d’une main inflexible par Juliette Journaux, les quatre lieder extraits de Des Knaben Wunderhorn se fraient sans mal un chemin dans les broussailles de nos préférences.
Autre voix mémorable, Anne-Lise Polchlopek dont les Trois Ballades de François Villon dessinent un filigrane les Geneviève, Tasse chinoise et autres rôles maternels de l’opéra français que la jeune chanteuse devrait habiller d’une étoffe chaude de mohair et de soie.
Un bémol général cependant sur la prononciation du français dont la limpidité s’avère en deçà de ce que l’on peut attendre à l’issue d’une année de formation au répertoire mélodique.