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Cinq questions à Laurence Kilsby

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Interview
22 juin 2023
Laurence Kilsby aura marqué cette saison lyrique par de remarquables prestations, que ce soit dans Bach ou dans La Scala di seta.

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Membre de l’Académie lyrique de l’Opéra national de Paris, le jeune ténor anglais ne manque pas de projets captivants. Quelques jours avant sa prestation dans Looking for Bernstein à l’Amphithéâtre de l’Opéra Bastille, nous rencontrons Laurence Kilsby à Paris, où le chanteur a choisi de s’établir.

Comment avez-vous décidé de devenir chanteur professionnel ? Avez-vous des modèles ou des artistes qui vous ont particulièrement inspiré lors de votre apprentissage du chant ?

En Angleterre, le chant choral fait partie de nos traditions, et tout petit, avec ma voix d’enfant de soprano, je faisais partie de la chorale locale dans les Cotswolds, à côté d’Oxford. Un jour, nous sommes allés écouter la chorale de la cathédrale de Gloucester. J’ai été ébloui, ce fut pour moi une véritable révélation. Je suis entré ensuite pendant quatre ans comme choriste à la Schola Cantorum de l’abbaye de Tewkesbury. À cette époque, en 2009, j’ai remporté à l’âge de 11 ans le concours de « Young Chorister of the Year » organisé par la BBC, qui était retransmis dans tout le pays. Je me suis ainsi fait connaître, en donnant ensuite beaucoup de concerts (dont un au Royal Albert Hall), en participant à plusieurs émissions TV et en enregistrant des disques. Et puis ma voix a mué…

J’ai eu de la chance car ma mue a été comme une pause vocale, tout à fait naturelle. Je l’ai ressentie au moment où j’enregistrais, en tant que soprano, L’Allegro, il Penseroso ed il Moderato de Haendel, aux côtés du Gabrieli Consort. Ma voix semblait glisser vers le bas et, dans l’aigu, c’était comme si je chantais en falsetto. Après la mue, j’ai chanté comme baryton dans la chorale de mon école, mais ma voix est devenue de plus en plus aiguë. Je faisais alors beaucoup de comédies musicales. J’ai également toujours aimé la danse, ayant fait beaucoup de ballet classique lorsque j’étais enfant. Finalement, j’ai choisi à 19 ans de déménager à Londres pour étudier la musique. J’ai alors obtenu une bourse pour étudier la musique classique au Royal College of Music.

Quatre ans plus tard, j’ai intégré le Curtis Institute of Music à Philadelphie. Mais on était en pleine crise sanitaire, l’université était à moitié fermée et il n’y avait pas grand-chose à faire. Pendant cette période, j’ai eu toutefois la chance de rencontrer mon professeur de chant actuel, le ténor italo-américain Jack LiVigni, qui a eu une grande influence sur mon développement en tant que chanteur. Un ancien collègue de Londres m’a alors dit que l’Académie de l’Opéra de Paris cherchait un ténor. J’ai déposé ma candidature, un peu en retard, mais, j’ai été sélectionné. Entre temps, les projets se sont peu à peu développés et je vais quitter l’Académie un peu plus tôt que prévu, à la fin de cette saison.

J’admire des artistes très différents mais ma plus grande inspiration est Fritz Wunderlich. Sa voix est si chaleureuse, si ronde, il est le plus beau Tamino selon moi. Le ténor anglais John Mark Ainsley est également un modèle pour moi. Sa façon de chanter est exquise, très facilement identifiable.

J’écoute également des voix féminines. Lorraine Hunt-Lieberson est un modèle absolu par exemple : elle chante avec beaucoup de cœur, de couleur. Elle a un côté vulnérable que j’apprécie particulièrement. C’est pourquoi j’aime tant l’atmosphère des récitals ainsi que la musique ancienne. Il y a une conversation directe avec le public, une façon de jouer, d’expérimenter au niveau de la couleur, de ce que l’on fait avec sa voix et de la façon dont les émotions peuvent se manifester. 

© Benjamin Reason

Comment avez-vous rencontré Raphaël Pichon, avec qui vous avez régulièrement collaboré depuis ?

J’ai auditionné pour Raphaël Pichon en 2019, sur les conseils de mon agent de l’époque. Il m’a proposé de chanter dans son chœur Pygmalion pour la Passion selon Saint Jean, un projet malheureusement annulé suite au Covid. C’est donc en 2021 que j’ai finalement collaboré avec Raphaël pour la première fois au Festival de Salzbourg dans la Messe en ut de Mozart, en tant que choriste et soliste. Le travail avec Raphaël est très particulier, à la fois très précis et très inspirant. Nous avons plusieurs projets en commun pour la saison à venir : le Requiem de Mozart, des Cantates de Bach, ainsi qu’un très beau programme Schubert à l’Opéra Comique : L’autre voyage. Il s’agit d’une sorte de pasticcio réunissant plusieurs extraits d’opéras du compositeur. Je chanterai aux côtés de Stéphane Degout et Siobhan Stagg, dans une mise en scène de Silvia Costa.

En août prochain, vous chanterez dans Les Troyens de Berlioz sous la direction de John Eliot Gardiner. Pouvez-vous nous en parler, ainsi que de vos autres projets ?

En effet, je vais chanter les rôles de Hylas et Iopas dans Les Troyens, à l’occasion d’une tournée qui passera par Versailles, Berlin, le Festival de Salzbourg, les BBC Proms et le Festival de la Côte-Saint-André. John Eliot Gardiner a dirigé cette œuvre avec grand succès il y a plusieurs années à Paris. Je me réjouis de travailler à ses côtés, ainsi qu’avec son Orchestre Révolutionnaire et Romantique, sur instruments d’époque. Je suis ravi de chanter ces deux rôles dans Les Troyens, qui sont très complémentaires : l’un plutôt virtuose, l’autre plutôt intimiste. John Eliot Gardiner et Raphaël Pichon ont beaucoup en commun : la même attitude face à la musique, le même désir de créer quelque chose d’intéressant, notamment dans leur approche de Bach. J’adore la langue française, qui est si belle et qui convient très bien à ma voix. J’ai beaucoup chanté Poulenc, et Berlioz me semble avoir cette même élégance.

Je vais continuer à interpréter beaucoup de musique baroque. Il y aura le Messie de Haendel à la fin de l’année 2023. Je participerai également en 2024 à une reprise, à Cologne, de la Poppea créée au Festival d’Aix-en-Provence et mise en scène par Ted Huffman. J’avais beaucoup apprécié participer à ce spectacle, tout comme à l’Orfeo à l’Opéra d’Amsterdam en 2019. C’était une belle synthèse artistique entre la musique et la danse, dans laquelle je me sentais complètement dans mon élément. Dans le baroque, je vais prochainement chanter mon premier Evangéliste et j’ai sinon d’autres très beaux projets pour les années à venir !

J’ai abordé récemment Rossini dans La Scala di Seta. Dans le cadre intime du Théâtre de l’Athénée à Paris, c’était très rafraîchissant et très libérateur de chanter dans une comédie. J’aimerais sinon évidemment aborder les grands rôles de Mozart : Ferrando, Don Ottavio ou encore Belmonte. Enfin, j’ai plusieurs projets de récitals, notamment Susan Manoff et Julius Blake, au Wigmore Hall à Londres.

Avec quels artistes aimeriez-vous collaborer dans les années à venir ?

J’aimerais beaucoup travailler avec Barrie Kosky. J’admire beaucoup sa façon de voir les choses, qui implique l’être tout entier, c’est très physique. J’avais adoré son Agrippina au Royal Opera House avec Joyce DiDonato, ainsi que sa mise en scène de Saul de Haendel.

Victoria Sitjà, ma collègue metteuse en scène à l’Académie de l’Opéra de Paris, m’a fait récemment découvrir l’œuvre de Patrice Chéreau. C’est elle qui va mettre en scène notre spectacle Looking for Bernstein pour cette fin de saison. Elle est très talentueuse et inspirante et j’aimerais beaucoup travailler sur une grosse production avec elle. J’adorerais également collaborer avec Nicholas Hytner, qui a dirigé le Royal National Theatre pendant une trentaine d’années. Il a ensuite fondé en 2017 le Bridge Theatre, qui présente des spectacles très innovants.

En dehors du chant, avez-vous d’autres passions ?

J’adore me balader dans Paris, où j’habite depuis un an maintenant. C’est très différent de Londres qui est si étendu qu’il est impossible de découvrir beaucoup de choses en marchant. Depuis le Brexit, le fait d’habiter en France est beaucoup mieux d’un point de vue professionnel, et c’est également très pratique pour voyager.

J’écoute également beaucoup de musique. Du baroque, car cela me met toujours dans une humeur détendue. Je suis très obsessionnel dès lors qu’il s’agit de musique : dès que j’accroche sur un morceau, il faut que je l’écoute en boucle pendant des jours et des jours. C’est le cas en ce moment avec le dernier morceau de Kylie Minogue ! J’aime aussi écouter du jazz : Ella Fitzgerald, Nina Simone, etc. J’aime bien sûr regarder des films, aller au théâtre. Mon français n’est pas encore assez bon, mais j’aimerais beaucoup aller voir une pièce en français à la Comédie Française. À Londres, j’allais très régulièrement au National Theatre.

Enfin, j’adore cuisiner, une passion que j’anime depuis le premier confinement. Je ne suis pas vraiment un cordon bleu, mais j’aime passer du temps à essayer des recettes !

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