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Félicity Lott en Maréchale à La Monnaie

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Interview
31 décembre 2001

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Détails

 

Ce soir au Théâtre royal de la Monnaie aura lieu la dernière représentation d’un Chevalier à la Rose qui aura surtout été marqué par un fabuleux trio de voix féminines. En tête de cette distribution, Dame Felicity Lott, de retour à Bruxelles quinze ans après sa première Maréchale aux côtés de Sir John Pritchard. Elle répond à nos questions avec l’esprit et l’humour que nous lui connaissons mais aussi avec une pointe de mélancolie, tout à fait surprenante.
 

Il y a un peu plus d’un an, on vous voyait triompher au Châtelet dans La Belle Hélène. En ce moment même, il y a une reprise ; cependant vous n’en faites pas partie. Comment expliquez- vous ce choix, si c’est un choix évidemment ?
 

On m’avait proposé de faire la reprise avant même le début des répétitions de la première série de représentations. Et comme je ne connaissais pas très bien La Belle Hélène dont je n’avais vu qu’une mise en scène qui ne m’avait pas emballée, j’ai décidé qu’il serait sage de ne pas m’avancer à signer pour vingt représentations supplémentaires, surtout si ça avait été un échec cuisant. Mais au fond, c’est peut- être mieux de ne pas faire la même chose une année après, cela évite les comparaisons ; je suis certaine qu’on aurait dit  » c’était mieux l’année passée  » comme on pourra dire cette année « c’est mieux avec Katerina Karneus ». J’avoue tout de même qu’à la fin des représentations de l’année dernière, j’ai été très triste.
 

Dans La Belle Hélène, on vous a vu dans un emploi assez inhabituel, jouant une femme un peu nymphomane avec un sex appeal incroyable ; est- ce que ça vous a donné envie d’essayer d’autres rôles aussi délurés ?
 

Waw, thank you ! J’ai eu tellement de plaisir à chanter ce rôle, à faire rire les gens. C’était merveilleux ! J’avais déjà chanté quelques airs d’opérettes d’Offenbach et de Messager et j’avais aussi chanté des opérettes allemandes comme La veuve joyeuse et La Chauve-souris, mais je n’avais jamais pensé à chanter dans une opérette d’Offenbach. Pourtant je trouve ça tellement drôle, fin et bien écrit ! Il y a aussi le fait que j’aime chanter de la musique simple, qui est à la portée d’un public plus large. Marc Minkowski et moi avons beaucoup insisté pendant nos interviews pour dire à quel point notre démarche était sérieuse, c’est de la très belle musique et Marc l’a travaillée comme s’il travaillait du Mozart.
 

Ce travail dans La Belle Hélène vous a permis de rencontrer toute cette jeune génération de musiciens français qui foisonnent autour des musiciens du Louvre. Comme voyez- vous leur travail ?
 

Ils sont extraordinaires ! Oh qu’est ce que j’ai eu peur les premiers jours de répétitions quand j’ai vu tout ce qu’on leur demandait et tout ce qu’ils parvenaient à faire ! Je connaissais Natalie Dessay, bien sûr, dans ses incarnations d’Olympia, de Zerbinette, et Eurydice, j’avais aussi eu l’occasion de l’entendre à Chicago dans une Alcina au casting incroyable : Susan Graham, Renée Fleming [ndlr : reprise de la production parisienne de 1998 avec William Christie dont il existe une gravure chez Erato.] Je suis tout à fait en admiration devant elle, d’abord quel chant -je suis incapable d’arriver à de telles notes !- mais aussi ce panache, cette façon qu’elle a de se jeter par terre en tenant des contre- notes ! Et on retrouve cette aisance chez tous ces jeunes chanteurs… Je me suis donc demandé ce que je pouvais faire pour entrer dans cette équipe. Je suis tout de même heureuse que Natalie Dessay n’ait pas fait partie de cette production. (rires) Il y avait aussi dans ce spectacle Michel Sénéchal qui est extraordinaire, une véritable leçon de chant, une diction comme on n’en fait plus.
 

F. Lott par Johan Jacobs

 

Alors justement, vous avez énormément chanté la Maréchale et la comtesse dans Capriccio, qu’est- ce que ça vous apporte d’aborder ce rôle une nouvelle fois ?
 

Ça m’apporte beaucoup et c’est à chaque fois différent grâce aux nouveaux partenaires, puis la Monnaie nous a vraiment offert le luxe de pouvoir répéter aussi longtemps [plus d’un mois], car bien que je connaisse le rôle il y a toujours des choses à découvrir. Par exemple, dans le premier acte, au milieu, habituellement je sors pour changer de robe et c’est toujours une panique incroyable car on n’a que quelques minutes pour entrer dans son corset, le lacer, enfiler le costume, se recoiffer, boire un peu d’eau et dans cette mise en scène -par contre- je ne sors pas de la scène ce qui me permet d’écouter toutes ces petites choses qui me passaient un peu sous le nez dans d’autres mises en scène ; j’ai honte de le dire parce que depuis tout le temps que je chante ce rôle je devrais connaître l’opéra par coeur ! Puis je n’ai pas fait tellement de nouvelles mises en scène du Chevalier à la rose, j’ai fait une nouvelle mise en scène à Glyndebourne où je chantais Octavian avec John Cox et puis j’ai fait une mise en scène au Châtelet avec Armin Jordan il y a neuf ans, sans oublier ma prise de rôle ici à la Monnaie en 1986 avec sir John Pritchard dans une mise en scène d’Elisabeth Schwarzkopf. Mis à part ça je n’ai fait que des reprises, c’était très bien de pouvoir travailler autant avec une équipe vraiment extraordinaire. Puis Antonio Pappano a été présent tout le temps, il connaît très bien les voix, il joue du piano, il accompagne, il sait comment on respire et comprend où sont les difficultés de la partition. Vraiment, c’est une très bonne expérience… le seul problème c’est qu’il a plu un peu trop souvent (rires).
 

Dans ce Chevalier à la Rose, vous travaillez avec deux chanteuses extrêmement jeunes et prometteuses que sont Kristin Jepson et Camilla Tilling, que pensez- vous d’elles ?
 

Je connaissais Kristin avec qui j’avais chanté Le Chevalier à la Rose au Metropolitan Opera, c’était sa prise de rôle et elle l’a fait quasiment sans répétitions. Elle a une voix superbe du début à la fin et Dieu sait si c’est compliqué de chanter Octavian. Avec elle on ne sent pas du tout l’effort, puis elle joue bien, elle est drôle. C’était merveilleux puisqu’on a commencé les répétitions le 25 octobre, ce qui m’a permis de partir quelques jours à Paris ou en Angleterre, mais elle habite New York et est donc restée à Bruxelles tout ce temps à travailler ! Je pense qu’elle a un avenir très prometteur. Je ne connaissais pas du tout Camilla, mais j’aime beaucoup ce qu’elle fait, elle chante très très bien, et ce que Sophie doit faire dès le début avec tous ces aigus, ça revient à jouer au funambule et avec quelle aisance elle le fait ! D’ailleurs elle n’est pas comme les autres Sophie, elle a beaucoup de spontanéité et de jeunesse, j’aime bien sa façon de dire  » il faut que je sois modeste et effacée  » et en fin de compte elle n’y arrive pas, elle a vraiment beaucoup d’esprit. Et j’ai l’impression que les trois voix fonctionnent très bien dans le trio.
 

Tout à fait autre chose : vous avez beaucoup défendu Poulenc et son écriture vocale, que vous jugez paradisiaque, et on vous sent très attachée à Ravel et à tous ces musiciens français dont l’oeuvre vocal compte énormément sur la littérature. Quelle place prend la littérature dans vos options artistiques ?
 

Une très grande place, j’ai fait une licence de français avant de commencer mes études de chant, j’ai toujours adoré la langue française et je prends énormément de plaisir à dire des textes intéressants. J’aime aussi dire des bêtises quand elles sont drôles et bien écrites, avec esprit. D’ailleurs je trouve que La voix humaine de Jean Cocteau est un texte magnifique, j’ai la pièce dite par Simone Signoret et j’adore les versions musicales de Berthe Bovi et de Denise Duval. Je l’ai chanté ça pour la première fois en 1977 pour la tournée de Glyndebourne, j’avais fait la Comtesse dans Capriccio en 1976, mon premier rôle straussien… c’est un peu bête, je commence à enregistrer aujourd’hui les oeuvres que je chante depuis des années !
 

Dernière question, qui saute aux yeux : vous êtes belle, grande, intelligente et vous chantez divinement bien ; comment expliquez- vous qu’en fin de compte Quinquin préfère Sophie ?
 

(rires) Elle est jeune et belle ! Et puis c’est lui qui mène le jeu, il trouve enfin quelqu’un qu’il peut protéger, la situation se renverse : c’est le contraire avec la maréchale, qui est plus une figure maternelle. C’est quelqu’un de la famille aussi, je suppose qu’elle le connaît depuis qu’il est tout petit (rires) et puis c’est l’histoire, il faut laisser la place aux jeunes.
 
Propos recueillis par Camille De Rijck

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